L’implication des autorités religieuses dans le règlement des différends considérés comme graves permet de maintenir la paix et la cohésion sociale.
By Ambroise DAKOUO (Kidal, February 2009)
Les mécanismes locaux de règlement des conflits hérités de l’histoire des pratiques traditionnelles, dans la localité de Kidal, on pour but de consolider la cohésion sociale, la paix et surtout l’équilibre des rapports humains. En dépit de la complexité des litiges qui se posent entre les habitants, les acteurs traditionnels investis dans la gestion des conflits recherche toujours la résolution consensuelle afin de préserver les liens sociaux.
La ville de Kidal, chef lieu de la huitième région administrative du Mali se situe au Nord du Mali. La ville de Kidal comprend une population estimée à 25 000 habitants, pour une superficie de 10 000km2, soit une densité de 3 habitants au km2. Cette population est constituée essentiellement de kel tamacheq, cependant on dénombre également la présence de différents groupes ethniques dont les maures, les sonrhais, les bambaras, etc. La principale activité de la zone demeure l’élevage de type transhumant de camelins, de caprins et d’ovins ; toutefois on note que le commerce et l’artisanat se développent de façon satisfaisante. La principale religion dans cette localité est l’islam.
Les habitants de la ville de Kidal sont essentiellement des populations nomades qui s’identifient à travers des tribus. Ces tribus sont administrativement organisées au sein des groupes appelés fractions. La fraction étant une société tribale. La population majoritaire de la ville de Kidal qui sont les kel tamacheq qui sont réparties en quarante (40) fractions.
Dans la localité de Kidal, les acteurs traditionnels impliqués dans la gestion des conflits ont été confrontés en 1984 à un cas de litige qui menaçait la paix entre deux fractions. Les fractions dont ils s’agit sont : Ahel et Bayes. Dans les faits, il s’agit d’une dispute entre deux jeunes appartenant chacun à l’un et l’autre fraction. Il se trouvait que les deux personnes étaient en concurrence afin de marier une fille de la ville. Mais le premier étant mécontent que l’autre concurrent de la fraction Ahel prenne le dessus sur lui, ce dernier de la fraction Bayes se mit à la provocation ce qui entraîna d’innombrables disputes entre eux. Les bagarres qui s’en ont suivi entraîna par finir la mort de l’autre concurrent de la fraction Ahel.
Suite à ce meurtre, la fraction victime se présenta chez le cadi de la ville, afin de lui faire savoir son mécontentement. Ayant été informé de cela, le cadi convia la partie accusée en vue d’écouter leur version des faits selon. En effet, le jeune accusé et membre de la fraction Bayes reconnu son acte et affirma que le meurtre s’est commis de façon non prémédité.
Par ailleurs, il faut affirmer que les deux fractions échange de bons rapports depuis bien longtemps. C’est ce qui a d’ailleurs emmener les deux fractions à opter pour un règlement consensuel de ce différend au niveau des acteurs traditionnels. D’ailleurs à chaque fois que le cadi s’implique dans la gestion d’un conflit, il prône l’approche consensuelle entre les différends parties ; car dans la localité les populations préfère un selon elles le mauvais arrangement au bon jugement. Pour les populations, l’action à la justice (moderne) peut conduire à des situation de discorde irréversible entre les différends parties toute chose perçue comme nuisible à la cohésion sociale.
Le cadi a donc rendu sa décision en recommandant à la fraction Bayes de payer la dia’a (le prix du sang). D’après le canon musulman, la dia’a est le prix du sang que paye toute personne coupable de meurtre. Cette amende est s’élève au payement de 50 chamelles et peut augmenter suivant la complexité du meurtre. Ainsi donc vu que l’implication des autorités judiciaires n’a pas été sollicité par la partie victime et que par conséquent il souhaitait garantir la cohésion sociale. Le cadi a décidé du payement de 100 chamelles par les membres de la fraction Bayes à celle de la fraction Ayes. Cette décision a été acceptée par la fraction Bayes qui s’en est équité permettant le rétablissement de la paix entre les deux fractions. En effet, la décision du cadi s’est faite en tenant en compte toute les paramètres socio- culturelles rentrant dans le cadre du règlement. Dans la localité, il faut dire que les populations ont plus confiance aux jugement que rend le cadi, parce qu’ en dépit même de l’aspect pénal de certains litiges, celui- ci y apporte des résolutions qui restaurent la paix et la cohésion sociale entre les habitants. L’acceptation de ses règlement sont également d’autant plus facile que la base de ces règlement demeure les coutumes et le Droit musulman, toutes choses aux quelles se reconnaissent pleinement.
Pour refonder la justice moderne, il importe de puiser dans les connaissances traditionnelles locales en matière de délivrance de justice. Aussi longtemps qu’on fera de la recherche de l’harmonie et de la cohésion sociale, une nécessité, on contribuera à promouvoir une bonne culture de la paix. A Kidal, le cadi intervient pour très fréquemment dans la gestion des litiges. Au Mali il n’y a pas de cadre juridique qui définisse la nature de leur intervention, cependant au niveau local les acteurs de la justice moderne y ont recours à leur expertise afin de régler certains différends sociaux. Dans ce cadre là , ces derniers établisse dans un document légal le cadre de leur collaboration, qui constitue aussi pour les acteurs religieux une reconnaissance administrative.
Cette fiche est issue de l’entretien avec Monsieur Mohamed Ag ILJIMIETTE, Sociologue (personne ressources) ré sident à Kidal. La supervision a été assurée par Monsieur Djibonding DEMBELE (correspondant thématique) et par Madame Néné KONATE (Médiatrice de l’ARGA/ Mali).