L’exemple des recettes extraordinaires et du fonds de dotation
By NIASS, Cheikh Tidiane (Taïba Niassène, April 2009)
Le Sénégal a opté pour une politique de décentralisation progressive, depuis son accession à la souveraineté internationale. De 1960 à 1996, d’importantes avancées ont été notées, ce qui laisse croire que la décentralisation est irréversible. C’est ainsi que la loi N° 96- 07 du 22 mars 1996 fixe les modalités du transfert des compétences aux collectivités locales. Parmi les 9 domaines transférés, figure la Santé. Mais, sur le terrain, la décentralisation a- t-elle les moyens de sa politique, notamment dans le domaine de la santé ?
Aujourd’hui, c’est une lapalissade de dire qu’il est difficile aux populations de satisfaire les immenses besoins de santé. Il convient de préciser que la collectivité locale, en l’occurrence la communauté rurale de Taïba Niassène, assure la gestion de la structure sanitaire, conformément à la réglementation. Ainsi, le Conseil Rural est censé assurer la construction, l’équipement, l’entretien et la maintenance des postes de santé ruraux, cases de santé et maternités rurales. A ce titre, le Président du Conseil Rural préside un comité de gestion étoffé, lequel délibère sur le budget, les activités sociales des postes de santé ruraux, etc. Il est évident que pour accéder à toute la demande socio sanitaire, il faut des moyens conséquents. Or, les fonds que l’Etat alloue aux collectivités locales sont insignifiants par rapport aux besoins des populations en matière de santé. Par exemple, pour l’année 2009 le fonds de dotation de la décentralisation dans le domaine de la santé s’élève à 2 000 000 F CFA pour la Communauté Rurale de Taïba Niassène.
Une autre source dans la mobilisation des ressources financières est la taxe rurale. Dans un contexte de paupérisation du monde rural abandonné à son sort, il est évident que cette taxe même entièrement recouvrée demeure incapable de combler un tel déficit financier.
Une dernière alternative : les recettes extraordinaires possibles dans le cadre de la coopération décentralisée. Mais, là aussi, il y a des difficultés dans l’obtention de visas pour certains Président de Conseil Rural, pour les présidents de comité de santé et vice président de la commission santé. Ce qui fait que nombre de collectivités locales se trouvent dans l’impossibilité de tisser un réseau de relations partenariales qui pourraient constituer des appuis aux populations dans le domaine de la santé.
Pour preuve, à Taïba Niassène, le comité de santé avait écrit en 2004 à une ONG belge dénommée « Action Touba Wuta Sénégal », ce qui a permis d’avoir gracieusement une ambulance médicalisée, avec l’appui du Président du Conseil Rural et surtout du Marabout local.
La modicité des fonds de dotation allouée aux collectivités rurales est, entre autres, une parfaite illustration des failles de la politique de décentralisation. Ce n’est pas pour rien si les ruraux résument la caractéristique de la politique de l’autruche dans le transfert des compétences sous forme de cette boutade : « Prends, mais n’y touche pas ! »
On comprend dès lors pourquoi les conseils ruraux, pour satisfaire les besoins de santé des populations se tournent vers les légitimités traditionnelles et religieuses ayant pignon sur rue notamment à l’extérieur du pays. C’est justement le cas ici du marabout local représentant la famille Niass dont le fondateur de la branche confrérique est l’une des plus grandes figures de l’Islam de l’ouest africain du dernier siècle.
En tous les cas, l’Etat doit augmenter de manière significative les fonds de dotation de la décentralisation afin de permettre aux collectivités locales d’améliorer l’accès aux soins de santé des populations à moindre coût
Communauté rurale, c’est une collectivité locale en milieu rural