Un cas d’école recueilli au centre de référence de Nioro
By BA, Adama (Nioro du Rip, July 2009)
Erigé en centre de référence, le centre de santé de Nioro a vu son plateau technique progressivement relevé : service ORL ; Maternité ; Bloc opératoire ; Odontologie ; Radiologie ; Laboratoire, etc. Et l’un des derniers services et non le moindre, un bureau de l’éducation pour la santé dont les activités couvrent la totalité du département de Nioro. Mais ce bureau est dirigé par un seul agent, une aide sociale qui a bien voulu du reste nous livrer ici son expérience en IEC (Information Education Communication) dans le cadre de la prévention et du traitement des Maladies Sexuellement Transmissibles (MST).
Le cas concerne la dame AD. Elle est mariée. Elle habite le village de Darou Mouniaguène à 2 Km de Porokhane (10 Km de Nioro). La dame AD est en état de grossesse. Lors d’une consultation prénatale, elle a fait l’objet d’un dépistage. Après analyse, les résultats sont positifs. Elle est porteuse du VIH / sida. Toutes les approches tendant à faire prendre conscience à la dame de la gravité de sa situation et de la nécessité de sa prise en charge sont restées vaines. Malgré les difficiles conditions de travail, notamment le manque total de véhicule pour les déplacements et l’absence de crédit alloué à ce volet, le service s’est évertué en sacerdoce à maintenir le contact avec la dame par le truchement de la campagne d’IEC à domicile. Tous ces efforts inlassables ont fait en sorte que la dame vînt accoucher au Centre de Référence de Nioro. Mais cet acquis fut vite remis en cause par le refus systématique du mari – OS, polygame à 4 femmes- de coopérer pour se faire dépister lui aussi.
Après l’accouchement de AD, le bébé a fait l’objet d’un dépistage et les résultats de l’analyse ont été positifs. Dès lors, le service se devait d’accorder une attention particulière à la famille. C’est pourquoi, les campagnes d’IEC se sont poursuivies à Darou Mouniaguene avec toujours pour cible la famille de OS. C’est ainsi que l’une des 4 épouses est venue d’elle-même pour un dépistage. L’analyse la concernant a été aussi positive. Ces derniers résultats ont définitivement levé les dernières équivoques sur les présomptions qui pesaient sur le chef de famille comme étant la source de propagation de la maladie. Par la suite, la situation connut un nouveau rebondissement. Comble de malheur, l’enfant, qui en principe devait être pris en charge fut subitement confié à sa grand-mère dans un autre village dont la famille refusa de dévoiler le nom. Les campagnes d’IEC en direction de la famille à Darou Mouniaguène n’en continuèrent pas moins. Heureusement, la conjugaison de l’appui de deux ONG « AWA » et « Counterpart International » et les efforts de plusieurs années de patience et de persévérance a été payante. L’ensemble de la famille, le chef y compris, les 4 épouses et les 2 enfants ont été tous pris en charge par le centre de référence de Nioro. Lequel centre a mis gratuitement à leur disposition les antirétroviraux. Le traitement s’est poursuivi et s’est même révélé efficace. Mais, quand bien même ce cas aurait connu un heureux épilogue, cela ressemble à tous égards à une goutte d’eau dans l’océan ! Et pour cause, d’autres cas plus critiques attendent dans l’anonymat et finiront par devenir un réel danger de santé publique en raison du manque criard de moyens.
La santé fait partie des 9 compétences transférées aux collectivités locales. Si l’Etat a construit et équipé le centre de référence avec de surcroît en appui les fonds de dotation, les autorités municipales, auraient dû prendre conscience de l’enjeu capital de la prévention pour s’impliquer davantage. Les loumas qui se tiennent tous les jours de la semaine, la proximité de la Gambie sont autant de facteurs qui aggravent la propagation des MST.
Un seul agent, quelle que soit par ailleurs sa bonne volonté et sa disponibilité, ne peut être efficace sans le minimum. Et pourtant, sur la question, il suffit d’une réelle prise de conscience de l’équipe municipale en rapport avec le comité de santé et les partenaires au développement pour que les campagnes en IEC brisent le mur du tabou.