By T Frederic YAMEOGO (Ouagadougou, December 2019)
Située à proximité d’autres localités durement touchée par les attaques terroristes, la commune Namisiguima était épargnée jusqu’à une date récente. Selon le Maire Bamogo Noraogo, les terroristes ont commencé par venir donner des instructions aux populations de ne pas vendre de l’alcool dans le village. Après cela, ils sont revenus encore et ont même félicité les habitants du village parce que que les instructions étaient suivies. Donc personne ne s’imaginait que le village pouvait faire l’objet d’attaque. La commune ne faisait qu’accueillir les déplacés internes de communes environnantes, ayant fait l’objet d’attaques terroristes. Mais contre toute attente, Namissiguima a été attaqué. Cette localité n’a jamais connu la présence de l’armée, de la police ou de la gendarmerie. La commune était devenue non seulement un passage mais aussi un lieu de ravitaillement pour les terroristes, parce qu’ils y faisaient même le marché. Ainsi ces entrepreneurs violents traversaient régulièrement Namissiguima pour aller attaquer d’autres villages.
Le Maire pense que pour chercher les causes d’insécurité et de violence dans la région, il faut être de la région, être né dans les zones concernées pour comprendre certaines choses. Selon lui les gens confondent l’insécurité et djihadisme. Ce que la région du Centre-nord connaît aujourd’hui n’est pas du djihadisme. Ce sont des règlements de compte. Cela fait vraiment peur, confie le maire en donnant l’exemple du choix des cibles des terroristes. Ainsi si deux personnes ne s’entendaient pas depuis belle lurette, elles profitent de la situation pour régler les comptes. Ou encore, si une personne a des animaux que quelqu’un d’autre garde, si le propriétaire n’est pas à côté, le gardien sait que c’est pour lui. Ce dernier fera tout pour qu’on tue le propriétaire. Par exemple par le passé, si une personne a eu des problèmes avec un peulh et ce dernier l’a attaqué en justice et il n’a pas eu raison, il va profiter de cette donne pour le tuer et les gens vont dire que c’est du djihadiste. Pour bien illustrer cette situation, il prend le cas du village de Zoumtenga où 4 personnes ont été tuées par des peulhs et après vérification, il se sont rendus compte qu’ils étaient tous membre du comité de gestion de barrage. Dans toutes les zones attaquées, quand les djihadistes viennent, les mossis quittent les lieux pendant que les peulhs y restent. A Namiguima, le gouvernement vient de créer une base militaire temporaire pour assurer la sécurité, mais depuis l’arrivée de cette base, ce sont les peulhs qui fuient, alors qu’avant l’arrivée de cette base, ce les mossis qui se déplaçaient. Pourquoi ? s’interroge le Maire. Les comportements des peulhs sont d’autant suspects qu’avec l’arrivée de la base militaire, ces derniers ne rejoignent même pas les camps avec les autres déplacés et mais préfèrent rentrer en brousse, fait remarquer le maire.
Après analyse de la situation conflictuelle dans la région, le Maire tient pour principaux auteurs de cette violence, deux groupes. Il cite d’abord les milices d’auto-défense kolgweogos. Pour lui la situation extériorisée avec la création de ces milices qui, en l’absence de l’état ont soulagé la population, ils ont commis beaucoup de dérives et cela a fait naitre un esprit de vengeance chez les peulhs surtout suite à l’affaire de Yirgou où des centaines de peuls ont été massacrés. Les peulhs et les mossis ne s’entendaient pas il y’à très longtemps mais ils arrivaient malgré tout à vivre ensemble. Touchant le fond de la question, le Maire confie qu’au moment où Namisiguima, sa commune n’a pas été encore attaqué, les peulhs de la commune disaient à qui veut l’entendre que jusqu’à présent il n’ont pas été attaqué parce que les kolgweogos de la commune n’ont pas participé aux évènements de Yirgou.
Mais estime le Maire, les vengeances, les règlements de comptes ont fait que malgré tout, sa commune à été attaqué, il y’à 11jours de cela (préciser la date). D’abord, ils sont venus tuer un vieux parce qu’ils ont appris que le vieux à un enfant qui est militaire (sergent). Le lendemain, explique ils sont allés dans un autre quartier et s’attaquer à deux jeunes et ils ont réussi à tuer un, mais l’autre à été blessés et a pu s’échapper trois jours après, il a été retrouvé et les femmes ( parce que les terroristes ne s’attaque pas aux femmes) ont été dépêchées pour aller l’amener avec des charrettes et une fois mis hors de danger, le blessé confie que quand il était blessé et mourant, les peulhs venaient lui demander si ces parents-là (les mossis) ne vont pas venir le sauver.
A la question de savoir s’ils ont des soutiens au niveau des populations, le Bourgmestre de la localité fera tout simplement savoir que beaucoup sont de la localité. Il ajoute qu’avec avec l’opération Dofou, les terroristes qui sont venus d’ailleurs sont repartis et ce sont leurs élèves recrutés sur place qui sont en train de commettre ces exactions avec des complices, généralement des parents, aussi des ressortissants de la localité, qui sont dans la masse, épousent leur manière de faire. Ainsi nul besoin de s’intégrer localement puisqu’ils y sont nés. A part la terreur, le pillage, la mort, la désolation, la vengeance, ces terroristes d’un autre genre n’offrent ou n’imposent aucun service aux populations. Par ailleurs note le maire, les populations sont très affectées par les agissements de ces entrepreneurs violents. Ils ne savent plus à quel saint se vouer. Pour lui, Les premiers déplacés des premières attaques terroristes ont eu le temps de prendre quelque chose avant de partir. Mais les derniers déplacés n’ont même pas eu le temps pour prendre quelque chose. Ils n’ont rien. Ils sont partis laissant tout leurs biens et ils ne peuvent plus revenir parce que s’ils le font les terroristes vont les tuer. Pire la majeure partie de leurs biens ont été pillés par les terroristes. Tout cela, sans préjudice du choc émotionnel dû à la perte des proches. C’est pourquoi ils trouvent que les populations s’adaptent difficilement à la situation.
L’autre problème qu’ils ont c’est que l’assistance en vivre ne sont pas à la hauteur du nombre des déplacés, surtout que des sites ne sont pas reconnus et donc loin du regard des ONG.
Selon les dires du Bourgmestre de Namisiguima, quand les terroristes arrivent ils tuent les hommes, ils ne touche pas aux femmes. Les femmes les voient chaque fois en brousse quand elles vont à la recherche du bois, mais dés qu’elles tournent le dos pour aller avertir au village, les terroristes changent d’endroit. Ce qui fait, selon le Maire, que les hommes de sécurité sont souvent découragés parce que chaque fois que la population remontent une information, ils partent et ne trouve personne. Pour le Maire, même si on n’arrive à finir avec le phénomène du terrorisme, pour que les gens vivent puissent vivre ensemble, ça sera difficile parce que il y’aura vraiment de la méfiance et les vengeances vont continuer. Pour lui quelqu’un ne peut pas s’asseoir voir son voisin tuer son frère et qu’il arrive même à l’identifier.