By DAFF, Sidiki Abdoul (2000)
L’ ASDES est une structure mise en place en 94, regroupant les 40 ASC de Kaolack (500.000 habitants). Le principal objectif de ce regroupement est le développement de la citoyenneté et la gestion de la cité en associations avec les populations.
Le maire fut plusieurs fois invité par les jeunes qui l’interpellèrent sur diverses questions importantes pour eux (éducation, sport…). Ces mêmes jeunes rencontrèrent le maire pour voir avec lui comment ils pourraient en lien avec la commune nettoyer la place du marché. Ce maire ne partage pas une optique démocratique et son ambition n’est pas de voir participer la population ; mais dans la mesure où ce mouvement de masse a pris une grande ampleur, et dépasse les affiliations politiques, il lui devient difficile de se dérober, et lorsqu’il le fait, sa politique clientéliste devient évidente.
Les organisations de base de Kaolack sont allées plus loin. Les différents groupements, GPF, ASC, ont une longue tradition au niveau des quartiers. À l’exemple de l’APROFES (Association pour la Promotion de la Femme Sénégalaise) partie d’un quartier de Kaolack, et réunissant dans un premier temps, tous les groupes de femmes de la ville, à l’exemple de l’ASDES, partie du même quartier de Kaolack et regroupant toutes les ASC de la ville, les OCB (Organisation Communautaire de Base) décidèrent de franchir un niveau d’organisation supérieur, d’unir toutes leurs forces sur le quartier, puis de créer, à partir de ces coordinations de quartiers, une coordination au niveau de la ville.
Il y a eu une sensibilisation à la base dans chaque quartier. Ce comité de quartier issu du vote de la base est composé de 50 membres avec un quota par association. Cette désignation donna lieu à une vaste mobilisation, en particulier pour les associations de femmes, qui luttèrent pour obtenir une représentation de 40 %. C’est à ce niveau qu’apparaissent les limites d’un processus démocratique, au Sénégal tel qu’il est aujourd’hui. Le maire et son parti commençaient à regarder avec inquiétude cette mobilisation et structuration de la base qui, à terme, risquait de rendre impossible une gestion clientéliste. En peu de temps, les hommes du maire employèrent tous les moyens pour court-circuiter cette initiative de la base. Ils s’investirent dans l’élection des comités de quartier n’hésitant pas à brandir menaces, violence, ou manipulation des voix, ce qui s’avère à court terme un moyen de contrôle.
Cet épisode qui a profondément marqué les organisations de base doit être matière à réflexion, et doit conduire à de nouvelles stratégies pour le mouvement de base et la reconnaissance des populations. En effet, quand on relit la déclaration de Dakar 98 issue de la rencontre des habitants de 11 pays africains, on reste frappé par son inapplicabilité immédiate. En effet dans le préambule, les habitants dénoncent la caricature de démocratie en Afrique : " Le maire, qui devrait être à l’écoute et au service de l’ensemble des habitants, semble parfois se comporter autoritairement, ne prenant en compte que ses propres intérêts et ceux de sa famille politique « .
Mais dans les propositions, ils énoncent des principes, qui risquent de demeurer des voeux pieux, tant ils entrent en contradiction avec les pratiques des maires : " Améliorer les relations du couple habitants / élus afin que la claire décision qu’ils prennent à deux permette l’intervention des différents acteurs dans la production et la gestion de la ville et mettre en place un système de concertation de suivi et d’évaluation impliquant les différents acteurs « .
L’intention est juste, mais ce serait gravement se leurrer, que croire que, dans la situation présente, les maires qui ont administré seuls jusqu’à maintenant seront prêts à administrer en se concertant avec les populations. Ceci signifie que le seul dialogue, ne pourra contribuer à faire avancer les choses. Il faudra par une pression multiforme obliger les maires à s’engager dans des espaces de cogestion.