Commercialisation de l’anacarde dans le Nord-Est de la Côte d’Ivoire

La présente expérience est conduite par Inades-Formation Côte d’Ivoire (IFCI) sous la direction de Madame Koné Kadidja, Formatrice chargée du programme d’appui accompagnement des organisations paysannes de la région du Zanzan. Cette expérience qui a démarré en 1995 se déroule dans la région de Bondoukou au Nord-Est de la Côte d’Ivoire. C’est une région de savane peu favorable aux cultures de rente habituelles de la Côte d’Ivoire (café, cacao, coton).

Dans les années 1960, la région avait bénéficié des plantations communautaires d’anacardiers à titre de reboisement. Mais la collecte des noix de cajou et leur commercialisation sur le marché local plus tard a suscité un intérêt économique par cette culture qui a fini par prendre de l’importance pour devenir une culture de rente pour les paysans de cette région. Or, la production devenant de plus en plus importante, la vente des anacardes s’est heurté au problème de marché et de prix non rémunérateur pour les producteurs.

IFCI ayant été sollicité par la Communauté laïque des Missionnaires catholiques (CLMC), une ONG italienne, pour un appui-conseil dans la région de Bondoukou, a saisi cette opportunité pour accompagner la dynamique de commercialisation de l’anacarde, par les producteurs de cette région.

L’objectif de cet appui est d’aider les producteurs d’anacarde à commercialiser leurs produits pour en tirer le meilleur profit.

Les acteurs engagés dans ce processus limités aux planteurs et aux petits acheteurs au départ se sont rapidement multipliés avec le développement de cette culture devenue la culture de rente de la région de Bondoukou, autrefois, déshéritée. De nouveaux acteurs sont venus ainsi renforcer le secteur avec des intérêts qui sont parfois opposés. Au nombre de ces acteurs, il y les structures d’appui, dont IFCI et l’ Agence nationale d’appui au développement rural (Anader), les acheteurs, les transporteurs et les pouvoirs publics.

L’importance que prend aujourd’hui la plantation d’anacardier en Côte d’Ivoire et les enjeux économiques liés à cette culture suscite interrogations.

" Comment garantir le marché extérieur quand l’Inde qui en assure le monopole s’est lancé dans des plantations industrielles pour couvrir ses propres besoins ?

" Quels systèmes de transformation de l’anacarde faudrait-il adopter (transformation industrielle ou artisanal) pour rendre le produit plus concurrentiel et ainsi susciter la consommation locale ?

S’il est vrai que le contexte historique de la région de Bondoukou, autrefois déshéritée a favorisé l’extension de la culture d’anacardier, il faut veiller à la maîtrise de la filière anacarde, pour éviter des problèmes de commercialisation plus tard.

La démarche d’appui d’IFCI à la commercialisation de l’anacarde par les coopératives inter-villages, quoique originale, ne s’est pas préoccupée trop des instances de décisions au niveau des structures de l’Etat. IFCI s’est beaucoup plus investi au niveau des communautés de base, notamment dans l’appui à l’élaboration des plans de marketing, le suivi de la mise en ouvre de ces plans et leurs bilan/évaluation.

L’appui à la commercialisation de l’anacarde dans la région de Bondoukou a permis d’obtenir quelques résultats significatifs :

" Les producteurs ont amélioré leurs revenus, grâce à une meilleure vente de leurs produits ;

" Plus de personnes s’intéressent à cette activité, ce qui se traduit par l’extension des plantations ;

" Il y a aussi la diversification des acteurs et chaque acteur trouve son compte.

Quelques impacts de l’initiative sont aussi perceptibles. C’est le cas de la construction des maisons en dur, par les producteurs qui ont amélioré leurs revenus. IFCI capitalise l’expérience, en vue de son extension éventuelle. Les pouvoirs publiques jouent leurs rôles d’arbitrage, même s’ils ont des intérêts économiques voilés (taxes sur la commercialisation).

Quelques difficultés méritent d’être soulignées au niveau de la réalisation de cette expérience :

" Il y a l’instabilité des prix d’une année à l’autre et même au cours de la même année.

" Les intérêts divergents des acteurs poussent certains à la manipulation.

" Le partenariat est difficile pour des raisons d’approches et de visions non partagées.

L’expérience a quelques limites, notamment la difficulté de toucher certains acteurs clés, tels que le consortium des exportateurs. Il est difficile de lutter contre la désinformation des producteurs.

Malgré l’originalité de l’expérience qui a permis d’atteindre les objectifs fixés, il faut tirer des leçons relatives à la conjoncture favorable qui a facilité l’atteinte des objectifs. La dépendance à un seul acquéreur du produit qui est l’Inde et le plan de développement de cette culture par l’acquéreur, constituent des menaces pour l’avenir de l’anacarde de la Côte d’Ivoire. C’est pourquoi, les perspectives d’avenir doivent être orientées vers la diversification du marché extérieur et la transformation des anacardes.

L’étude du marché et de la technologie de transformation de l’anacarde en se basant sur les expériences d’autres pays, comme le Bénin en matière de transformation artisanale, devraient être prises en considération dans les stratégies de développement de la filière anacarde en Côte d’Ivoire.

Notes

Atelier d’Ecriture, entretien mené par Monsieur Amona N’Key (Inades-Formation Togo), à l’occasion d’un séminaire organisé avec Rongead, sur le thème : "Mondialisation et stratégies de développement local"

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