L’Espace d’Interpellation Démocratique - le Gouvernement à l’écoute du peuple.

Au Mali, le processus de démocratisation enclenché depuis 1991 a ouvert de nouvelles perspectives en matière de gouvernance. Ainsi, après les élections générales en 1992, les nouvelles autorités nationales ont développé des initiatives dans le sens des changements souhaités par le peuple. A ce titre, il s’agissait de trouver des alternatives permettant d’asseoir les bases d’une administration de proximité, notamment par le renforcement du dialogue entre gouvernants et gouvernés.

Dans ce contexte, l’Espace d’Interpellation Démocratique (EID) est un exercice d’application de la nouvelle stratégie de communication entre le Gouvernement et le Peuple. Il s’agit ici de permettre aux gouvernés de s’adresser directement aux ministres, les deux acteurs se trouvant dans la même salle. Selon les éditions, les travaux de l’EID ont duré de 10 à 15 heures d’affilé. Cette durée relativement longue n’a pourtant entamé en rien l’intérêt des populations à suivre de façon continue les travaux de cette rencontre.

L’expérience de l’EID est déjà vieille de sept ans. Ainsi, depuis 1994, elle est organisée à Bamako le 10 décembre de chaque année sous forme d’une rencontre entre l’ensemble des membres du Gouvernement et des citoyens qui s’adressent directement à eux au sujet de dossiers qui constituent pour eux des préoccupations.

Les travaux de cette rencontre sont organisés par une Commission chargée à cet effet de recevoir les interpellations, de les traiter et d’élaborer le plan de déroulement des débats. Aussi, un Jury d’Honneur composé de personnalités nationales et étrangères dont les Présidents des Associations des droits de l’Homme du Mali et du Burkina, est constitué pour faciliter les travaux de la journée et en assurer le suivi des conclusions et recommandations. Les travaux sont suivis directement par des centaines de citoyens qui font le déplacement sur les lieux de la rencontre. Cette rencontre est également diffusée en direct sur les antennes de la radio et de la télévision nationales.

Les interpellations auxquelles les ministres répondent recouvrent tous les aspects de la vie des populations: la corruption, la non application des verdicts de justice, la lenteur dans le traitement des dossiers au niveau des services administratifs, le non respect des dates annoncées pour le démarrage de certains projets ou programmes de développement, les mutations des fonctionnaires, le manque d’autorité de l’Etat dans la gestion de certaines affaires d’envergure nationale, le traitement des conflits liés à la gestion des domaines fonciers, etc.

Au sujet du rapport-bilan du Gouvernement concernant l’exécution des recommandations des EID, on remarque que beaucoup de préoccupations qui ont fait l’objet d’interpellations ont été effectivement prises en charge par les Ministères. Cependant, le Jury d’honneur qui a fait le constat de la reprise d’un certain nombre d’interpellations à plusieurs EID successives, a lancé un appel au Gouvernement et aux interpellateurs de faire plus d’efforts dans la mise en oeuvre des résultats des EID.

Concernant l’édition 2000, la Commission d’organisation a reçu plus de 240 interpellations sur lesquelles 80 ont été classées pour suite à donner. Elles portent sur des questions déjà prises en charge au niveau des différents départements. 34 ont été retenues pour être abordées au cours des travaux et les autres rejetées.

Après analyse de l’ensemble des interpellations soumises à la commission d’organisation, le Jury d’Honneur a dénoncé l’insuffisance des critères de classement utilisés qui n’ont pas permis de retenir certaines interpellations jugées par eux très pertinentes. Les membres du Jury ont également fortement insisté dans leurs recommandations sur le manque de suivi des recommandations faites au terme de chaque EID

La dernière édition a alors recommandé et obtenu du Gouvernement la mise en place d’une commission permanente de suivi des recommandations de l’EID qui impliquerait outre les représentants du Jury d’honneur et de la commission d’organisation, les ministères, les représentants de la société civile dont des interpellateurs.

Aussi, compte tenu de l’intérêt que les populations et le gouvernement ont porté à cet événement au terme des précédentes éditions, il a été recommandé de procéder à l’institutionnalisation de l’EID.

L’ EID est une innovation assez intéressante en matière de dialogue démocratique. Cependant, la durabilité et la crédibilité du processus dépendront fortement de la capacité des différentes parties prenantes à s’approprier les résultats qui en découlent et d’en assurer la mise en oeuvre.

COMMENTAIRES : L’EID est un exercice très apprécié par l’ensemble des acteurs à l’échelle du pays. Aussi, beaucoup de partenaires considèrent qu’il constitue en plus des radios privées et de la presse écrite, un cadre adéquat d’expression démocratique. Au delà de ces appréciations, l’EID est un exercice qui exige des membres du gouvernement de se mettre à l’écoute des populations et de leur rendre compte et permet au citoyen d’exercer son droit de demander des comptes au gouvernement. Toutefois, s’il est vrai que l’EID a conforté les bases de l’expérience démocratique du Mali; il est tout aussi vrai que la nécessité de l’inscrire dans une dynamique plus globale s’impose de plus en plus qui va du niveau local, régional au niveau national. L’enjeu, en effet, est d’ouvrir d’autres espaces à l’échelle locale

Legitimate governance
Re-founding the living together and the State
To build Peace and Security
Promoting the Territories and Development
Local Experiences

Keywords

Geographic

Méthodologiques