L’expérience du TOCSIN dans le processus de l’intégration régionale

Introduction

Le TOCSIN est une association apolitique, non confessionnelle et à but non lucratif qui a vu le jour le 15 mars 1997 suite à une assemblée générale constitutive tenue à Ouagadougou et qui a rassemblée une trentaine de personnes. Elle a été reconnue le 15 juillet 1997, sous le récépissé n° 97-173/MATS/SG/DGAT/DLPAJ. Aujourd’hui, l’association compte plus de mille membres et sympathisants au Burkina et hors du Burkina. Toute personne éprise personne éprise par l’idéal de l’intégration et de la question des droits des migrants est la bienvenue au TOCSIN. A cet égard, l’on compte parmi les membres du TOCSIN des nationaux burkinabè et des non nationaux (français, canadien, béninois). L’association est implantée dans les provinces suivantes, sous forme de sections ou de cellules : Houet, Comoé, Yatenga, Kourittenga, Poni et Passoré. Si c’est à l’occasion de la crise ivoirienne que le grand public a appris à connaître l’association, il faut cependant rappeler que les origines de la structure remontent en fin d’année 78, époque coïncidant avec un retour volontaire de Côte d’Ivoire de jeunes élèves burkinabè désireux de poursuivre les études au Burkina pour un certain nombre de raisons objectives et subjectives.

1-Pourquoi avoir créé le TOCSIN ?

Le Burkina Faso, ex Haute-Volta, avant la conquête coloniale, était constitué d’un ensemble d’entités indépendantes ayant leur propres cohérences et leurs organisations administratives et politiques. L’existence de puissances régionales, tels les royaumes Moose, Gourma et Peuls, a protégé la zone de la traite des noirs et des conquêtes de Samory Touré. La conséquence d’un tel état de fait est que le taux d’habitant au km2 était l’un des plus important de la sous-région. C’est ce qui explique qu’après la conquête coloniale française (septembre 1896), la colonie de la Haute-Volta (créée le 1er mars 1919) fut qualifiée, pour son malheur, de « Terre des hommes », au regard de son importance démographique. Conformément à la politique économique coloniale consistant à utiliser la main d’œuvre des pays de l’intérieur pour développer les riches terres des pays de la côte, les colonies furent soumises à une exploitation en règle au profit de la métropole. C’est ainsi que les populations voltaïques vont être déportés et convoyés par centaines de milliers pour les plantations et la construction des infrastructures routières de la colonie de Côte d’Ivoire, du Mali et du Sénégal. La saignée humaine atteindra son paroxysme durant les quinze ans (5 septembre 1932- Septembre 1947) pendant lesquelles la colonie fut supprimée et démantelée : le Nord fut rattachée au Soudan, l’Est au Niger et toute la partie Sud depuis Ouagadougou à la Côte d’Ivoire.

Les travaux forcés et l’impôt de capitation, qui ont été particulièrement violents en colonie de Haute-Volta (de nombreuses chansons en attestent), ont contraint de nombreux Voltaïques à s’exiler en Gold Coast. Des milliers d’autres ont été utilisés pour la construction du pont et la mise en valeur de la plaine rizicole de Markala (Mali).

Un tel rappel vise à montrer que la présence des Burkinabè dans les pays limitrophes n’est pas le fait de la fatalité, mais le résultat de la politique coloniale française. Au sortir de la colonisation, les premières élites africaines, en l’occurrence Félix Houphouët-Boigny, Ouézzin Coulibay et Maurice Yaméogo ont signé des conventions de main d’œuvre permettant à la Côte d’Ivoire d’utiliser les ressources humaines de la Haute-Volta pour son développement. Un tel accord, il faut l’avouer, s’est révélé plus profitable à la Côte d’Ivoire. La Haute-Volta s’est enfoncé dans le sous-développement et la misère tandis que la Côte d’Ivoire inventait son miracle.

La colonisation est cause de la migration structurelle que connaît le Burkina, car les politiques qui ont été mises en œuvre depuis les indépendances n’ont pas su rompre avec le schéma de développement hérité de la colonisation. La période révolutionnaire de Thomas Sankara (1983-1987) n’est pas parvenue à freiner la saignée humaine ; l’on a paradoxalement accentué le phénomène en y ajoutant la fuite des cerveaux.

Si à ces causes historiques, l’on ajoute le découpage colonial qui n’a doté le pays d’aucun débouché maritime ou fluvial, la pluviométrie capricieuse, l’aridité des sols, l’absence de ressources hautement stratégiques, il est aisé de comprendre que la présence au monde du Burkina tient du miracle. A cet égard l’indice de classement du PNUD qui classe le pays parmi les derniers a oublié malheureusement de prendre en compte le fait que la compétition est inégale. Il est, à la limite, indécent de classer des pays qui n’ont pas les mêmes atouts de départ !

L’association le TOCSIN est née suite à une série de constats :

Devant une tel tableau, un groupe de personne (pour la plupart issues de la migration), prenant conscience de la force que représente la diaspora burkinabè, et mesurant le risque d’une cassure entre les Burkinabè de l’intérieur et la diaspora, après plusieurs années de de réflexions et tentatives plus ou moins réussies, s’est réuni le 15 mars 1997 pour porter sur les fonds baptismaux l’association le TOCSIN dont le préambule est ainsi libellé:

‘’Nous filles et fils Burkinabè de l’extérieur ayant rejoint la mère patrie, en symbiose avec les Burkinabè de l’intérieur réunis en Assemblée Générale, décidons de la création d’une association nationale d’intégration, de solidarité, de défense, de promotion des droits humains et de paix dénommée «Association le TOCSIN» ‘’.

L’association s’est dotée d’un logo reflétant sa philosophie. Il s’agit d’une une cloche de couleur noire qui sonne à l’intérieur d’un Burkina vert placé dans une Afrique de couleur blanche. L’ensemble est compris dans un globe terrestre de couleur bleue. Des rayons partent de la cloche en direction du monde. Le vert marque l’espoir, le reverdissement et la réhabilitation du Burkina, tandis que le blanc du continent traduit une volonté de réécrire de nouvelles pages glorieuses. Le bleu de l’univers symbolise la quête de paix et la fraternité entre les hommes sans aucune distinction. La cloche sonne et résonne pour alerter et mobiliser les Hommes de bonne volonté pour la construction du Burkina afin d’en faire un havre de prospérité, de paix et de tolérance.

L’association poursuit les objectifs suivants : - initier et d’encourager toutes les activités favorisant l’intégration des Burkinabè de l’extérieur - inciter les Burkinabè de l’extérieur à participer au développement du Burkina Faso- développer la solidarité entre ses membres - servir de relais entre les organisations gouvernementales et les Burkinabè de l’extérieur, sans exclusion aucune.

Le choix de la dénomination TOCSIN n’est pas fortuit. En effet le TOCSIN désigne la sonnerie d’alerte et d’alarme d’une cloche. Lorsque sonne le tocsin, les individus conscients se mobilisent pour se préparer à affronter un danger ou une situation nouvelle. Les membres fondateurs du TOCSIN ont estimé que la forte présence de Burkinabè est à la fois une chance et une source de dangers qui devraient inciter tous les Burkinabè à demeurer vigilants afin de prévenir une éventuelle catastrophe humanitaire (retour massif, rapatriement collectif, massacre de la diaspora, etc.). L’association TOCSIN se veut le vigile du bien-être et des difficultés des Burkinabè de la diaspora et des migrants en général. Dans son combat pour les droits des Burkinabè de l’extérieur, le TOCSIN se fait fort de défendre les droits des Non- Burkinabè résidant au Burkina.

Le TOCSIN s’inspire, dans son action, de la sagesse africaine qui considère que l’étranger est un envoyé des génies en vue de tester l’humanité des hommes. Contrairement aux pratiques en cours, aussi bien en Occident que dans certains pays d’Afrique, l’étranger n’est pas un être étrange, mais plutôt un hôte de marque qui, par conséquence, mérite beaucoup de considération et de respect. L’étranger est si sacré chez les Moose qu’il est stipulé que l’on se doit de lui abandonner la natte et coucher à même le sol. L’étranger n’est pas un pestiféré, un bouc-émissaire sur lequel il faut porter les échecs et les malheurs de la société.

L’humain se caractérise par son sens de partage et de tolérance. C’est une telle préoccupation qui a conduit les membres du TOCSIN à décliner le mot Tocsin sous la forme d’un acronyme pour en faire la devise de l’association qui se présente comme suit: TOus pour le Combat de la Solidarité et de l’INtégration.

2- Bilan des actions

La question de l’intégration pour le TOCSIN n’est pas une option mais un impératif catégorique. Il s’agit d’un combat à mener car les obstacles à lever sur la voie de l’intégration en Afrique sont multiples et immenses. L’intégration implique un esprit de solidarité et de partage qui semble ne pas faire partie des valeurs de la globalisation et de la mondialisation. Les pères fondateurs des pays de la sous-région ont raté le pari de l’intégration au moment des indépendances. Les uns et les autres ont préféré être des têtes de rat plutôt que des queues de lion. La balkanisation du continent a sonné le glas de l’intégration et de l’unité africaine. C’est pourtant sur ces oripeaux qu’il faut construire les fondements de l’intégration que des années d’indépendance solidaire ont contribué à détruire. L’intégration est une question de volonté politique et non la simple somme d’actes administratifs que la pratique des agents de l’Etat et de certains citoyens démentent tous les jours, en toute impunité. Sans minimiser l’importance de l’intégration économique, le TOCSIN estime que la véritable intégration est celle liée à la libre circulation des hommes et non celle liée à la libre circulation des marchandises. C’est fort de cette conviction que le TOCSIN a fait du droit des étrangers et des migrants un des axes majeurs de ses interventions. En effet de la gestion des migrants et des étrangers dans les divers Etats de l’Afrique de l’Ouest dépend la paix régionale. La solidarité entre les peuples doit primer sur la solidarité des Etats qui sont le plus souvent les véritables fossoyeurs de l’intégration.

Les frontières héritées de la colonisation qui sont, pour la plupart, des plus artificielles ont surtout consisté à désunir ce que l’histoire a savamment uni et à unir ce que l’histoire n’avait pas encore rassemblé. En outre, les Etats ont œuvré, dans leur volonté de construire les Etats-nations, à forger des nationalités propres au forceps, en éloignant les peuples des frontières les uns des autres. Dans ces conditions, l’on comprend aisément toute la difficulté des dirigeants politiques à faire tomber les barrières qu’ils ont contribuées à ériger. Dans les faits, les peuples de l’Afrique de l’Ouest sont plus intégrés qu’on ne le croit ; l’espace ouest-africain ayant toujours été un continuum entre le sud forestier et le nord sahélien permettant les échanges entre les différentes populations qui entretiennent des liens séculaires repérables à travers les groupes de langues parlées et la similarité de pratiques culturelles et cultuelles. Les actions du TOCSIN s’inscrivent dans les axes suivants : l’alerte précoce et la sensibilisation- l’urgence humanitaire – la promotion et la défense des droits humains (essentiellement les droits des migrants et des étrangers).

2.1 l’alerte précoce et la sensibilisation

2.1.1 La crise ivoirienne

Depuis sa création, le TOCSIN a attiré l’attention des autorités burkinabè sur la dégradation de la situation des Burkinabè en Côte d’Ivoire depuis la nomination d’un premier ministre qui a institué la carte de séjour pour les étrangers. Même s’il faut reconnaître que depuis la crise économique qui frappé le pays , un certain nombre de mesures ont été prises à l’encontre des étrangers; l’on peut citer l’instauration de la carte de séjour sous le gouvernement du Premier ministre Allassane Dramane OUATTARA qui ne visait que les seuls étrangers. Mais la disparition du président Félix Houphouët-Boigny est le véritable point de départ de l’aggravation des conditions de vie des étrangers africains et plus singulièrement des Burkinabè en Côte d’Ivoire. De Henri Konan Bedié à Laurent Gbagbo, en passant par Robert GUEI, les Burkinabè ont payé le prix fort des difficultés socio-politiques du pays.

A travers des courriers adressés aux autorités, les déclarations et les interviews dans la presse nationale et internationale, le TOCSIN n’a eu de cesse d’interpeller les autorités sur les dégradations des conditions de vie des Burkinabè en Côte d’Ivoire et sur leur devoir d’assistance et de protection. Il a même été initié, en direction des Burkinabè de l’intérieur et de la diaspora, un journal d’information et de sensibilisation « les Echos du TOCSIN » qui traite de l’actualité nationale et internationale avec un accent particulier sur les droits des étrangers et des migrants. C’est ainsi qu’après analyse de la situation socio-économique en Côte d’Ivoire, et considérant l’exacerbation du climat politique, le TOCSIN a attiré l’attention de l’opinion nationale burkinabè sur l’éventualité d’un rapatriement massif des Burkinabè de la Côte d’Ivoire. En effet, les politiques avaient besoin de faire une diversion face à la crise sociétale que traversait le pays en polarisant l’attention de la population sur l’étranger que l’on présente comme le responsable de tous les maux du pays.

Malheureusement une telle analyse n’a pas été bien comprise par les autorités burkinabè. Par conséquent, elles ne purent nullement anticiper les événements de 2002 qui ont vu le retour forcé au pays de cinq cent mille (500.000) Burkinabè, suite à la crise militaro-politique survenue le 19 septembre 2002 en Côte d’Ivoire.

2.1.2 Les caravanes annuelles

Convaincu que la seule voie de développement durable pour les peuples de l’Afrique de l’Ouest, le TOCSIN a jugé utile d’accompagner le processus d’intégration économique initié par les autorités politiques. En effet les organisations régionales d’intégration telles l’UEMOA et la CEDEAO sont des cadres de construction d’une communauté régionale. Mais il faut avouer que de nouveaux obstacles persistent. C’est en vue de les lever que le TOCSIN a initié depuis 2000 des sorties annuelles qui, durant dix jours, conduisent une délégation d’une trentaine de participants à la rencontre des Burkinabè de l’extérieur, des autorités nationales et des associations et ONGs locales. Au cours des sorties, des messages d’intégration sont adressés aux autorités et des contacts sont établis entre celles-ci et les responsables des associations des Burkinabè de la diaspora.

Le TOCSIN s’est rendu successivement au Mali (2000 et 2005), au Ghana (2000), au Togo (2001), au Bénin (2002), au Niger (2004) et au Sénégal (2006) . Au cours de ses sorties, le TOCSIN expérimente, dans une certaine mesure, le parcours migratoire de la diaspora et se met à l’écoute des Burkinabè de l’extérieur en vue de recueillir leurs préoccupations et souhaits et attentes qui sont aussitôt communiqués aux autorités locales lors des séances de travail. Par la suite, un rapport est rédigé et transmis aux autorités du Burkina ainsi qu’aux sponsors et aux autorités des pays concernés par la sortie afin de les informer des résultats et des recommandations de la sortie.

2.1.3 Les tournées de football des communautés vivant au Burkina

En 1997, le Tocsin a organisé un tournoi de football qui durant deux mois a réuni les équipes des communautés suivantes : Mali, Guinée, Côte d’Ivoire, Ghana, Nigeria et les Margouillats . Depuis ledit tournoi des liens se sont tissés entre les membres de la communauté et des membres du TOCSIN. Le Gouvernement du Burkina a initié la journée des communautés qui permet aux membres des associations de la communauté étrangère de se retrouver et d’échanger avec les autorités et les organisations de la société civile nationales. Le TOCSIN y prend activement part.

2.1.4. Les ateliers, conférences et expositions sur les droits des migrants

Le TOCSIN organise depuis 1997 des ateliers sur les droits des migrants. Il s’agit de sensibiliser le public sur le devoir de considérer un étranger ou un migrant comme un humain à part entière. A ce titre, les migrants et les étrangers, dès lors où ils ne sont pas en infraction ont droit à toutes les protections de la part des autorités des pays hôtes. Malheureusement, il faut déplorer les traitements humiliants et vexatoires qui sont faits à l’encontre des populations étrangères par les forces de l’ordre des pays hôtes. Le TOCSIN a fait du lobbying pour que la télévision nationale projette le documentaire de Benoït SCHEUER « Côte d’Ivoire : poudrière identitaire ». L’on a obtenu la projection sur la télévision Canal 3 du documentaire « RTI : média pyromane » suivi d’un débat. Le TOCSIN a animé plusieurs conférences pour expliquer les causes proches et lointaines de la crise que traverse la Côte d’Ivoire et ses répercutions sur le Burkina.

A travers la presse, le TOCSIN interpelle régulièrement les autorités nationales, la communauté ouest-africaine, la communauté internationale sur les cas de violations massives de droits humains : expulsions massives de populations négro-africaines de la Libye, du Maroc, de la Côte d’Ivoire, du Gabon, du Togo, etc. Il s’agit pour le TOCSIN de dénoncer les différentes dérives et atteintes aux droits humains qui sont de nature à retarder l’intégration régionale et africaine.

Le TOCSIN entretient des relations de bonne intelligence avec les représentations diplomatiques de la sous-région présentes au Burkina. Ceci se traduit par des courriers qui leur sont adressés pour traduire la solidarité du TOCSIN vis-à-vis des succès remportés par leurs pays ou la compassion lors de la survenue d’événements tristes et malheureux.

2.2 L’urgence humanitaire

La plus grande catastrophe humanitaire que le Burkina ait jamais vécue a été l’expulsion massive des centaines de milliers Burkinabè depuis les événements du 19 septembre 2002 en Côte d’Ivoire. Il s’agissait d’une récidive du conflit de Tabou qui en 1999 a vu près de 150.000 Burkinabè chassés du Sud-ouest ivoirien. Le TOCSIN a mobilisé des ressources pour soulager la détresse humaine sur les plans alimentaires, sanitaires, scolaires et vestimentaires. Des opérations ont été menées pour permettre l’inscription d’étudiants victimes de la crise ivoirienne à crédits et leur octroyer des tickets de restaurant. La même disposition a été adoptée lorsqu’il s’est agi de recueillir les étudiants réfugiés ivoiriens désireux de poursuivre leurs études à l’université de Ouagadougou. Il en fut de même lors de l’expulsion de migrants ivoiriens de Libye qui ont rejoint Ouagadougou à bord de l’avion affrété par le Burkina. Il en fut de même lors des obsèques de l’épouse de l’un des ambassadeurs de Côte d’Ivoire lorsqu’une délégation du TOCSIN forte de dix personnes a effectué le déplacement à Abidjan au moment où l’on traquait les compatriotes dans les quartiers « précaires ». C’est également de la même attitude de compassion que le TOCSIN a fait montre lors de l’accident d’un car malien ramenant des rapatriés, survenu à Koudougou . Le TOCSIN a convoyé certains des malades à Ouagadougou et informé les autorités de l’ambassade du drame.

Plus récemment, le TOCSIN a recueilli une jeune Nigériane âgée de 15 ans qu’il a soustrait des mains de proxénètes qui voulaient l’introduire dans le circuit de la prostitution. Avec le concours du ministère de l’action sociale et de la Solidarité nationale et des autorités de l’ambassade du Nigeria, la jeune fille a été reconduite saine et sauve au Nigeria.

Le TOCSIN a eu à apporter son assistance et à intercéder auprès des autorités lors de la rébellion intervenue dans le milieu des réfugiés du HCR qui ne voulaient plus rester au Burkina. Chassés de la cour de la cathédrale où ils avaient trouvé refuge, ils ont été contraints d’aller squatter le long du mur du HCR pendant plusieurs jours, sous la pluie, avec des femmes et des enfants !

Le TOCSIN a également apporté son assistance lors de la grève de la faim observée par une militante de droits de l’homme de Côte d‘Ivoire devant les portes de l’ambassade des USA pour protester contre les violences en cours dans son pays.

2.3 La promotion et la défense des droits humains

Pendant de nombreuses années, il était admis que les Etats pouvaient en toute impunité chasser les ressortissants étrangers installés sur leurs territoires. Les exemples sont légions. L’impunité générant la récidive, il nous a paru désormais inacceptable que des Etats violent les traités signés qui leur font obligation de protéger des ressortissants de la communauté étrangère sur leurs territoires. Il devient désormais urgent que les citoyens de la communauté ouest-africaine et plus singulièrement les ONGs de défense de droits humains se mobilisent pour traquer les autorités politiques qui s’illustrent tristement, durant leur mandat, en matière de violation de droits humains. Avec beaucoup d’intérêt, le TOCSIN suit le dossier de Charles Tylor et de Hissène Habré.

Les fonctions politiques doivent cesser d’être un passeport pour le crime et l’impunité ! Les victimes de violences et d’expulsions massives et abusives doivent s’organiser pour porter plainte devant les juridictions nationales et internationales afin d’obtenir la condamnation des criminels et la réparation des préjudices subis. Les Etats qui se rendent coupables de tels crimes doivent également être condamnés. Ceci aura pour conséquence d’inviter les autres à mieux se comporter à l’avenir.

L’intégration impose une ingérence humanitaire car il n’est pas moral, au nom du sacro-saint principe de la non ingérence, que l’on puisse laisser des crimes contre l’humanité se perpétrer dans un Etat tiers. Une telle attitude s’oppose à l’esprit de solidarité que prône l’intégration et s’apparente à de la complicité et à de la non assistance à population en danger.

 

 

3- Impact de l’association

Depuis sa création, le TOCSIN a apporté un plus dans le paysage associatif burkinabè et même régional. Association pionnière et leader dans le domaine des droits des migrants, le TOCSIN a fait des émules. L’on peut citer l’émergence de structures telles l’association Arc-en-ciel, le large front pour la défense des rapatriés, l’Association Teeg taaba femmes rapatriées de Côte d’Ivoire (ATESTAR), l’Association des rapatriés de Libye, l’Association des Victimes et Rapatriés de Côte d’Ivoire (AVARCI), etc. Membre fondateur de la Commission Nationale des Droits Humains, le TOCSIN est apprécié pour ses prises de positions non partisanes sur le plan politique. Une telle considération explique que le TOCSIN occupe le Secrétariat Général du WANEP-Burkina (West Africa Network for Peacebuilduing) et la coordination institutionnelle du WACSOF-Burkina (West Africa Civil society Organisations Forum). En 2004, le TOCSIN a été distingué « Personnalité francophone de l’année » par la Commission Nationale de la francophonie. Au titre des organisations de la société civile, le TOCSIN a effectué le voyage de Kléber (Paris) en janvier 2003 pour assister à la rencontre internationale consacrée à la crise ivoirienne. Lors de la visite de la rapporteuse spéciale des Nations Unies chargées d’évaluer les préjudices subis par les Burkinabè en Côte d’Ivoire, le TOCSIN a été désigné comme leader de la société civile. Au titre du WANEP , le TOCSIN a participé à l’élaboration de l’agenda global de l’Afrique en matière de prévention de conflits violents (Accra et Nairobi) dont le couronnement a eu lieu en juillet 2005 au siège des Nations Unies à New York lors des assises du GPPAC (Global Partnership for Prevention of Arms Conflict) du 19 au 21 juillet 2005.

Après des moments d’incompréhension, au regard de l’indépendance et du caractère de l’association, l’avis du TOCSIN est parfois requis par les autorités pour l’aide à décision. Mais il faut avouer qu’en dépit de toutes les démarches entreprises, le TOCSIN n’a toujours pas obtenu d’être déclaré association d’utilité publique par les autorités burkinabè.

L’un des combats que le TOCSIN mène sans relâche est celui de la citoyenneté des Burkinabè de la diaspora. En effet, les Burkinabè de l’extérieur sont privés du droit de vote aussi longtemps qu’ils résident dans leurs pays d’accueil. Aucun Burkinabè de l’extérieur ne peut se vanter d’avoir pu un jour participer aux élections burkinabè à partir de son lieu de résidence. Dans les pays africains, il est courant de constater que les étrangers sont interdits d’exercer leurs droits politiques dans les pays d’accueil. Il est même un truisme que d’affirmer que la politique est exclusivement l’affaire de nationaux. Et pourtant, l’on ne peut pas aller véritablement à l’intégration tant que l’on considérera que les individus issus de la communauté (UEMOA et CEDEAO) sont encore des étrangers et qu’ils sont interdits de droits politiques.

Le Burkina est très en retard en matière de droits de vote des migrants. La majorité des pays de l’UEMOA et de la CEDEAO (Côte d’Ivoire, Ghana, Mali, Bénin) organisent le vote de leurs concitoyens à partir des ambassades et consulats des pays de résidence. En dépit du lobbying exercé, des interpellations voilées et ouvertes du TOCSIN et de certains représentants de la diaspora, le Burkina demeure sourd quant à la question du droit des Burkinabè de la diaspora. Comment dans ces conditions construire une citoyenneté ouest-africaine, s’il existe et persiste des poches de déni de citoyenneté à une catégorie de personnes ? Il s’agit-là de mesures discriminatoires fondées sur le lieu de résidence qui ne font pas bon ménage avec l’Etat de droit. Le seul fait de posséder une carte nationale d’identité ou un passeport ne confère pas la citoyenneté. Celle-ci s’exprime par la liberté qu’ont les individus de participer aux choix de leurs dirigeants en exerçant leurs droits de vote. Si l’on ne prend pas des dispositions permettant aux ressortissants burkinabè de la diaspora de voter, comment peut-on envisager le droit de vote des citoyens de la communauté résidant au Burkina lors des scrutins locaux ?

Le TOCSIN œuvre à faire en sorte que la question de l’intégration cesse de devenir l’affaire des seuls technocrates et des politiques. En dépit de l’existence de textes juridiques, l’on constate que de nombreuses entraves existent et persistent sur le terrain de l’intégration. Les hommes chargés d’animer l’intégration se trouvent souvent les premiers à tirer profit de la non application des textes. Il s’agit des agents de l’Etat, sous couvert de la corruption et de l’impunité, rançonnent les voyageurs et violentent les étrangers ressortissants de la communauté. Le TOCSIN estime que si de nombreuses organisations de la société civile s’impliquaient dans le combat de l’intégration, en dénonçant les attitudes contraires à un tel idéal, il est à parier que dans un futur proche, l’Afrique de l’Ouest deviendra un espace propice à l’émergence d’une nouvelle citoyenneté !

4- Difficultés et perspectives

Les difficultés sont nombreuses dans ce type de combat. Il y a d’abord l’incompréhension des autorités qui doute par moments de la neutralité de l’association. Il en est de certains partis politiques de l’opposition qui ne la trouvent suffisamment engagée dans la dénonciation systématique de l’action gouvernementale. Mais la ligne de l’association est demeurée constante. Ceci lui vaut un certain crédit auprès de l’opinion nationale et régionale. Les moyens financiers constituent le point de faiblesse de l’association qui ne bénéficie d’aucune subvention de l’Etat et qui doit essentiellement compter sur la cotisation des membres et sur le financement de certains projets par la coopération bi ou multilatérale. L’organisation ne dispose pas d’employés rémunérés. Comme chacun le sait le bénévolat a des limites et ne permet de construire des actions pérennes.

S’agissant des perspectives, le TOCSIN fait du droit de vote des Burkinabè de la diaspora une question de principe, car il n’est pas acceptable que plus de six millions de Burkinabè soient exclus de la citoyenneté nationale du fait de leur résidence à l’extérieur. Des démarches ont été entreprises auprès des autorités et des structures chargées de la gestion des élections pour un plaidoyer dans ce sens. Il est à regretter que les dernières élections présidentielles se soient déroulées sans la participation de ce possible électorat, en dépit de toutes nos démarches et interpellations. Le TOCSIN dans sa lutte contre le rejet de l’autre et pour l’intégration des peuples oeuvrera pour que les citoyens de la CEDEAO puissent avoir la possibilité d’être éligibles lors d’élections locales.

L’association ambitionne susciter l’émergence d’organisations similaires dans les pays de l’UEMOA et de la CEDEAO afin de prévenir les dérives xénophobes et de lutter contre les manipulations ethniques et racistes. La construction de l’intégration régionale demande une plus grande implication des organisations de la société civile indépendantes et fortes. Pour cela, il leur faut s’organiser à travers des réseaux dynamiques qui se concertent périodiquement sur des questions nationales et internationales.

Conclusion

L’observation des crises socio-politiques du continent et dans la sous-région montre que les difficultés économiques et la pauvreté n’en sont pas les principales causes. Sinon comment expliquer que les pays les plus riches se retrouvent au bord du chaos, tandis que des pays très pauvres et très endettés maintiennent une certaine stabilité ? Les causes des conflits résident dans les inégalités et les injustices sociales. Les prises de conscience citoyennes des populations les rendent de plus en plus allergiques aux dominations, aux exclusions et aux refus de dialogue démocratique. C’est dire que la sous-région est encore pendant longtemps dans l’œil du cyclone. Le TOCSIN dans son combat pour l’intégration des peuples et pour la solidarité cherche à briser les murs des relations internationales fondés sur le profit et la domination. Aucun des pays de l’espace UEMOA et CEDEAO ne peut se vanter de n’avoir aucun de ses ressortissants installés dans les pays tiers. Chaque pays ayant ses étrangers, la protection de l’étranger doit être une des pierres angulaires de la citoyenneté régionale. C’est la raison pour laquelle, un appel doit être lancé aux peuples de la communauté, pour une prise de conscience des liens séculaires qui les lient les uns aux autres. Seul un tel sursaut peut éviter les dérives nationalistes qui sont contraires à l’idéal d’intégration, de solidarité et de fraternité entre les peuples.

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Cette expérience a été présentée contribution à l’atelier sur la « citoyenneté ouest africaine comme remède et antidote aux conflits violents » organisé du 19 au 22 mars 2007 à Ouagadougou. Cette rencontre a été organisé dans le cadre des activités de l’Alliance des initiatives africaines pour la paix et la stabilité en Afrique de l’ouest. il a bénéficié de l’appuis de l’Alliance.

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