Difficultés d’application des contrats de location entre l’Etat et les propriétaires de maison
Par BA, Adama (Nioro du Rip, août 2008)
La maison construite à Nioro est le fruit de plusieurs années de sacrifices et d’épargne. Elle est terminée en 1975. Elle est mise en location à de jeunes enseignants qui rechignaient à payer le loyer en fin de mois. La gestion fut difficile pendant deux ans.
En 1977 le besoin d’avoir une inspection départementale de l’enseignement est pressant. L’Inspecteur pressenti à ce poste, qui avait des connaissances au Ministère des finances, décroche rapidement la convention mettant la maison à la disposition de l’Etat. Il faut avouer que cette convention m’a enthousiasmé surtout à cause des tracasseries des enseignants mauvais payeurs.
Précisément, le 2 février 1977, je signais le contrat de location, en ma qualité à l’époque, de conseiller pédagogique à l’Inspection de l’Enseignement Primaire du Sine Saloum à Kaolack d’une part, avec Monsieur le Ministre d’Etat chargé des Finances et des Affaires Economiques agissant au nom et pour le compte du Gouvernement du Sénégal, conformément aux dispositions de la loi n°66 – 70 du 13 juillet 1966, portant code des obligations civiles et commerciales d’autre part.
L’objet du contrat de location est de mettre à la disposition du Gouvernement du Sénégal, pour une durée indéterminée, une maison sise à Nioro pour servir de logement et de bureau. Elle est composée de 9 pièces, de 2 débarras, d’une véranda, d’un WC, d’une douche et d’une clôture. Le contrat composé d’une dizaine d’articles stipule :
Article 1er : la location peut être résiliée à tout moment à la diligence de l’une ou l’autre des parties, sous réserve d’un préavis de six (6) mois.
Article 4 : l’Etat assure la charge des réparations de caractère locatif, entretient les locaux qui doivent être en bon état. Les grosses réparations incombent normalement au propriétaire.
Article 6 : le présent bail est conclu moyennant un loyer mensuel de vingt cinq mille francs payable trimestriellement et d’avance par virement à mon compte.
Mais après 31 ans d’application du contrat quel bilan en tirer ?
Le bilan est globalement négatif car l’article 1er prévoit la possibilité de résiliation du contrat or toutes mes demandes faites dans ce sens sont soit bloquées, soit perdues dans les labyrinthes de l’administration centrale. Il n’y a jamais eu de suite.
L’article 4 stipule que l’Etat doit entretenir les locaux, or rien de cela, tout au plus, les chefs de services successifs ont pris parfois personnellement l’initiative de procéder à l’entretien des locaux s’il y a urgence.
Mais c’est au niveau de l’application de l’article 6 que le bilan est le plus catastrophique. Il dispose que le loyer mensuel de 25 000 F est payable trimestriellement et par avance. Or, depuis 31 ans, le paiement n’a jamais été régulier. Présentement, l’Etat accuse des arriérés de paiement de près de 24 mois, arguant une dette intérieure importante. Pire, un redressement fiscal, à partir de 2003, m’a été notifié avec des surtaxes sur chaque année ce qui revient implicitement à l’aliénation en partie des sommes dues, même en cas de déblocage de la situation. Comment peut on payer des impôts et taxes sur des sommes non encore perçues à moins de faire des ponctions sur des fonds épargnés auparavant, ce qui est pratiquement impossible en ces temps de crise économique.
Les tentatives de réviser à la hausse le montant du loyer sont restées vaines malgré les surfaces corrigées faites par les experts immobiliers. Comble de malheur les agents du service de l’Assiette comme du recouvrement, indexent la valeur du loyer de la maison au cours actuel, ce qui aboutit au paradoxe que l’impôt et les pénalités équivalent à la moitié du montant dû mais non encore perçu. Cette situation n’est pas un cas isolé, elle est partagée par l’ensemble des propriétaires de maison liés à l’Etat par un contrat de location. L’association nationale des propriétaires de maisons conventionnées par l’Etat a tiré la sonnette d’alarme car beaucoup d’entre eux, qui avaient contracté des prêts pour bâtir leurs maisons ont eu des difficultés avec leurs banques. Malgré de vagues promesses de règlement de la dette intérieure l’Etat n’a encore fait aucun geste positif
La situation décrite se passe de commentaire. Incarnation de la nation, l’Etat se doit de soigner son image de marque, de respecter ses engagements. C’est un problème de crédibilité.
L’endettement intérieur récurrent a mis en faillite des entreprises et même certains particuliers (propriétaires de maisons conventionnées) et compromet gravement le développement économique et social du pays.