Par KEITA, Namory K. (2003)
La révolution du 26 mars 1991 ouvrait une ère de démocratisation au Mali. Les droits et devoirs de la personne humaine furent reconnus par la Constitution du 12 janvier 1992 en son titre premier.
A plan politique, le pluralisme qui était une des principales revendications du peuple malien, fut instauré. Une large exploitation de cette opportunité a abouti à la création d’un nombre important de partis politique.
De 1992 à nos jours, plus de quatre vingt (80) formations politiques occupent l’échiquier politique national.
La possibilité de créer plusieurs partis politiques est certes consacrée par la constitution en vigueur, cependant leur nombre exceptionnellement élevé, éloigne beaucoup d’entre eux de leur objectif initial qui est la conquête et l’exercice du pouvoir. En effet, la multiplication démesurée des partis, a engendré des conséquences néfastes qui se traduisent en une certaine faiblesse des formations politiques. Au nombre de ces conséquences on peut entre autres retenir :
1) la difficulté de mobiliser des militants
En raison de la diversité de choix qu’offre l’existence de plusieurs partis politiques, la mobilisation de vrais militants acquis à la cause d’un parti n’est plus facile. Les militants à la base ( y compris des responsables locaux) changent facilement de parti politique. Pour bon nombre d’entre eux, l’adhésion à une formation politique se fait sur la base d’avantages comparatifs (faciliter d’émerger, appui matériel ou financier ponctuel) et non sur celle d’une conviction politique basée sur un projet de société pertinent. Dans ces conditions, en l’absence de véritables stratégies de mobilisation appliquées de façon permanente, les partis politiques ont du mal à mobiliser des militants.
2) L’émiettement de l’électorat
Au cours des différents échéances électorales, plusieurs formations politiques entrent en compétition. Seuls quelques " grands partis " implantés à l’intérieur du pays, arrivent à recueillir des nombreuses relativement importants de suffrages leur permettant d’obtenir quelques élus. D’autres (la majorité) récoltent des suffrages négligeables ne leur permettant pas d’avoir un élu.
Cette situation est en partie liée au nombre assez important de partis politiques en présence. Il en résulte un émiettement de l’électorat qui ne favorise pas la constitution d’une majorité absolue au profit d’un parti politique si grand soit - il.
3) l’insuffisance des ressources humaines
Les ressources humaines constituent l’élément plus important d’une formation politique. Celles formées et capables d’impulser une dynamique, sont actuellement dispersées au sein des partis politiques en raison du nombre particulièrement élevé de ces derniers. Si certaines formations politiques en disposent en nombre relativement suffisant, d’autres (la majorité) en revanche, en manquent de façon criarde. Dans ce dernier cas, le parti souffre de cette lacune. Son point de vue et ses prises de position se ramènent à ceux de ses " leaders éclairés ". ses capacités de proposition d’alternatives en terme de dynamique interne et externe sont limitées, car il manque à la base de cadres capables d’alimenter la réflexion au sommet.
4) l’insuffisance de ressources matérielles et financières
La création de formations politiques au gré des évènements (à l’intérieur ou l’extérieur du parti) a donné naissance à des " micros - partis - politiques " disposant de peu de ressources financières et matérielles. Cette faible capacité financière et matérielle est la raison fondamentale pour laquelle ces partis n’ont pu présenter de candidats aux élections législatives dernières de juillet 2002. Au meilleur des cas, leurs activités se limitent à l’organisation des assises de leurs instances dirigeantes, occasion pour eux de donner signe de vie.
Au stade actuel de l’évolution de la démocratie au mali, la multiplication démesurée des partis politiques est plus ressentie dans ses conséquences comme une source de faiblesse de ces derniers.
Conscient de cette réalité indéniable, les leaders des partis politiques ont à la veille des joutes électorales de 2002, conclu des alliances qui ont donné naissance à trois grands blocs ou regroupements de partis politiques : la Convergence pour l’Alternance et le Changement (ACC) qui se réclame de la mouvance présidentielle, l’Alliance pour la République et la Démocratie (ARD) et Espoir 2002. Cependant, l’affaiblissement des partis est d’autant plus patent, que ces regroupements de circonstance n’ont permis à aucun bloc, d’obtenir la majorité absolue à l’Assemblée Nationale, au sortir des dernières législatives de juillet 2002. Nous osons espérer que les blocs vont évoluer vers des ensembles plus homogènes et solides pour donner au paysage politique malien, une nouvelle configuration propice au renforcement des formations politiques.