Le phénomène «Gakpo gblégblé» à l’assaut de la ferraille à Lomé.
Par Edoh Sossa (Lomé, avril 2009)
Lomé est la capitale du Togo, un pays de l’Afrique de l’Ouest. Avec le tiers de la population totale estimée aujourd’hui à six millions d’habitants, la ville connait de sérieux problèmes d’insalubrité. Les dépotoirs de Lomé sont jonchés de boîtes de conserve de toutes sortes, notamment des boîtes de lait et de tomate qui sont de consommation courante. Or ces boîtes peuvent rentrer dans la fabrication de matériels utiles pour la société.
L’expérience rapportée concerne le recyclage des boîtes de lait peak et de tomate que l’on trouve dans les sites de décharge des ordures ménagères et un peu partout en ville. En partant du fait que la fonte de ces boîtes donne un produit qui rentre dans la fabrication des ustensiles de cuisine comme la casserole, l’Association pour la Promotion des Initiatives Communautaires (APIC) a mobilisé des jeunes pour la récupération de ces boîtes. L’association leur a donné une formation sur la fonte artisanale des métaux et la fabrication des casseroles utilisées en cuisine. Pour cent (100) à deux cent (200) boîtes de lait peak ou de boîtes de tomate fondues, on obtient une casserole de 30 à 35 cm3. La demande étant forte sur le marché, les casseroles ainsi façonnées sont écoulées sur le marché sans trop de difficultés. Ces boîtes ont commencé à se faire rares dans la ville et sur les sites de décharge. Les agents de pré collecte font un tri qui leur permet d’isoler les boîtes. Aussi, des jeunes parmi lesquels les élèves, à la recherche d’argent de poche se sont jetés dans la récupération de ces boîtes qu’ils revendent à 225F CFA le kilogramme.
Aujourd’hui, cette pratique s’est étendue à la ferraille en général. De jeunes togolais et ceux de la sous-région ont fait de l’enlèvement des ordures métalliques, une activité lucrative principale. On les voit à travers la ville à la recherche de la ferraille, crier : « Gakpo gblégblé » qui signifie, dans la langue Ewé, langue du sud du Togo « fer gâté ». En fait le sens de cette phrase est : « Avez-vous de la ferraille en vente ? » ou bien « Nous cherchons de la ferraille. » C’est par cet appel que la population propose de la ferraille aux jeunes qui l’achètent après une pesée très rapide. Le demandeur de la ferraille se promène avec une balance qui lui permet de déterminer le prix de la quantité de ferraille qu’on lui propose à partir de son poids. Le poids marqué est lu et constaté par les deux parties. Dans les usages de ce commerce, à chaque poids correspond un prix.
Les boîtes de conserve et la ferraille en général rapportent de l’argent non seulement à ceux qui assurent leur recyclage mais aussi aux jeunes qui s’assurent l’argent de poche. Mais le recyclage de la ferrailles, contrairement au recyclage artisanal sur place des boîtes de conserve, n’est pas effectué sur place à Lomé. La ferraille est exportée loin du Togo.