Par KAMIAN, Lansana
" Aujourd’hui dans la commune, s’il y a un conflit qui venait à ce déclarer, on sait tout de suite à qui s’adresser et mieux le projet a doté la commune d’un instrument de développement car contribuant à instaurer la paix et par voie de conséquence assurer le recouvrement des impôts et taxes. " M.Lansana KAMIAN, Maire de la commune rural de Sio.
La Coordination des Associations, Groupements et Coopératives de la Commune de Sio (CAGS/Sio) est un collectif de 32 associations, groupements et coopératives. Elle est composée d’ASACO, d’APE, d’Associations socio-professionnelles et de femmes. La CAGC/Sio est porteuse du projet intitulé " Appui à la prévention des conflits pour une gestion concertée des terroirs dans la commune de Sio " financé par le PRSC.
L’inadaptation des règles et principes de gestion hérités des bonnes pratiques de la tradition suite aux multiples mutations dans le contexte socio-économique et politique, occasionne fréquemment des affrontements violents et de plus en meurtriers (au moins 5 par an), entre groupements de producteurs (agriculteurs, éleveurs et pêcheurs). A titre illustratif, nous pouvons retenir : le conflit foncier de Saremala entre les Rhimaïbé et les DIORO (propriétaires coutumiers de terres), les litiges/conflits entre les peulhs de Horoguendé et le village de Boussoua, le conflit entre la population de Boussoura et celle de Monkamou, les multiples affrontements isolés quasi permanents entre cultivateurs, éleveurs ou pêcheurs. Ces conflits entravent sérieusement les actions de développement et favorisent l’insécurité et la pauvreté dans la commune de Sio à cause des pertes de ressources financières. Par exemple dans le village de Boussoura, ces conflits ont coûté près de 5 millions de francs CFA en 7 ans aux populations. L’absence d’accord entre les acteurs (exploitants et gestionnaires des terroirs) pour une gestion rationnelle et durable des ressources et l’inexistence de mécanisme local et efficace de régulation de conflits entre les différentes commnunautés de producteurs favorisent tous cette situation. D’où la nécessité et la pertinence de ce projet pour trouver une solution locale durable au problème.
La CAGC/Sio de Mopti souhaite amener les divers utilisateurs et gestionnaires locaux des terroirs à développer une approche locale de gestion de conflits et litiges et à traduire ces recommandations en textes légaux afin d’enrailler les conflits.
Vu la sensibilité du sujet, la CAGC a mené une étude assortie d’une analyse avec les protagonistes directement impliqués dans les conflits pour en identifier les causes et en avoir une meilleure compréhension ; organisé et tenu un forum où tous les acteurs sont impliqués. Ce forum aboutirait à l’élaboration d’une convention locale en matière de prévention et de gestion des conflits qui précisera l’implication de tous les utilisateurs dans la fixation des périodes de descente et remontée des troupeaux, la création de gîtes pour les transhumants ; la mise à contribution de la commune dans l’identification des différentes associations. En outre, il est prévu l’information quotidienne et rapprochée des populations sur le déroulement des activités et la mise en place d’une commission de surveillance.
Ce projet a permis de faire de la commune de Sio, un espace de contacts, d’échanges et de convivialité entre les diverses communautés, un pool de développement communautaire et inter-communautaire en mettant en place une convention de gestion de conflits signée et acceptée de tous, avec la participation de tous les partenaires au développement. Actuellement, le document de convention signé par le maire de la commune de Sio et le président de la coordination attend sa validation par le juge de Mopti en vue d’être adopté comme vie légale de résolution des conflits liés à la gestion des ressources naturelles dans la commune de Sio. Avec le projet, la société civile dans la commune s’est forgée un nouveau rôle : celui de médiateur dans les cas de conflits. Les recours déjà enregistrés ont montré la preuve de l’efficacité de la coordination dans ce domaine. A ce jour, aucun cas de conflit n’a été signalé dans la commune depuis la tenue du forum.
Un certain nombre d’indicateurs attestent que ce projet est dans la bonne voie, celle conduisant vers l’atteinte plus ou moins globale des résultats attendus. Ainsi il est enregistré que DENA (un village de la zone) a vu sa demande de terre de culture satisfaite auprès des propriétaires terriens suite à des démarches effectuées ; les populations de Saremala ont cessé leur conflit de 10 ans ; l’étude sur les cas de conflits a été réalisée ; la coordination a intervenu auprès des décideurs pour faciliter la traversée des peulhs ; Rédynamisation et actualisation de la piste de transhumance : sites, pâturages à Saré-Mala (sources de tous les conflits) ; des missions de médiation dans la commune de Konari entre Guirowel et Karbaya ont été effectuées.
Effets et impacts :
Les actions initiées et mises en ouvre par la coordination de Sio constituent une première dans la zone et est un tremplin pour le développement de la commune. Les actions de CAGC servent d’exemple et de référence pour les communes environnantes. Nous pouvons retenir cette affirmation :
" Cette année, pour la première fois, il n’y a pas eu de conflit entre paysans et éleveurs à Soufouroulaye et de manière générale dans la commune de Sio et ce projet a permis pour la première fois dans l’histoire de la vie du terroir de réunir autour de la même table agriculteurs, éleveurs et pêcheurs qui sont restés longtemps antagoniques ", ces propos sont du Président de l’Association de Santé Communautaire (ASACO) de Soufouroulaye, M. Kassoum KAMIAN.
Le défis majeur auquel la coordination à été confrontée demeure l’analphabétisme de la plupart de ses composantes ; l’incapacité de la coordination à faire face aux différentes sollicitations communales et régionales et la mise à niveau permanente de la coordination pour intervenir efficacement dans les différentes matières.
Leçons apprises :
· L’union fait toujours la force ;
· Le dialogue et la concertation sont les meilleures armes pour asseoir un climat de confiance et de quiétude qui seul peut favoriser le développement ;
· La société civile est un partenaire essentiel dans a réussite de la Décentralisation à l’échelle locale et nationale ;
· La mobilisation communautaire est capable de résoudre les conflits et enclencher par voie de conséquence le développement local.