Par Mbaïbeguem Djimasdé Jonas (Ouagadougou, mars 2008)
1er Cas typique de Conflit entre deux groupes d’agriculteurs du village de N’tekego et du hameau de Mpebougou (zone de Fallou située dans la vallée de serpent, cercle de Nara, Sahel Occidental Mali).
En 1998, un conflit éclata entre deux familles cousines : l’une du village de N’tekedo (village mère) et l’autre du hameau de Mpebougou issu de Ntekedo depuis plus de deux (2) décennies. Le motif du conflit portait sur l’utilisation d’une vaste bande de terre agricole et pastorale située entre les deux (2) agglomérations. La famille influente de Mpebougou qui a prospéré grâce à la diversification de ses activités de production et possédait un troupeau important a demandé que cet espace soit réservé pour le passage des animaux et pour leur pâturage, alors que la famille leader du village d’origine (Ntekedo), propriétaire terrien et restée rattachée à l’agriculture, revendiquait l’intégrité de la partie comme étant le patrimoine de ses aïeux et voulait la mettre en culture. Suite aux altercations qui résultèrent de cette opposition, une plainte a été introduite par les nouveaux agro- pasteurs de Mpebougou auprès de l’administration locale. Afin de prévenir un affrontement violent, une commission informelle de médiation composée de représentant de quatre (4) villages ( à raison de 2 personnes par village) a été mise sur pied par des leaders villageois. Suite à la médiation de cette commission, un consensus a été trouvé pour un partage de l’espace en litige entre le village et le hameau.
La commission procéda à une délimitation des portions revenant à chacune des deux (2) parties.
Peu après, un commerçant originaire de Mpebougou et installé à Bamako décida de remettre en cause cette décision arrêtée de façon consensuelle par les acteurs locaux. Il sollicita le concours de deux (2) avocats de Bamako pour régler l’affaire devant les tribunaux en faveur de ses parents installés au hameau.
Cependant, mis au courant de la procédure engagée, un officier de douane originaire de Ntekedo usa de son influence pour l’annuler. En réaction, la famille de Mpebougou saisit à son tour l’administration pour revendiquer à nouveau l’intégrité de l’espace. C’est alors que la commission de suivi intercommunautaire des conflits fut mobilisée par l’administration. La médiation de cette dernière aboutit, mais elle consista simplement à confirmer la décision prise et la délimitation faite par la commission informelle. La famille de Mpebougou consentit enfin, de guerre lasse. Toutefois, curieusement elle consacra l’espace qu’elle a obtenu aux activités agricoles et non à l’élevage.
Ce conflit s’est étendu sur une période de deux mois.
A y regarder de plus près la cause profonde de ce conflit est le manque de disponibilité de bonne terre cultivable. Le besoin d’extension des surfaces cultivables était le mobile essentiel de la démarche de la famille de Mpebougou. Mais il a été dissimulé sous les apparences de la nécessité de faire paître les troupeaux des hameaux. ;
La fonctionnalité et l’efficacité des mécanismes traditionnels de gestion des conflits sont en proie aux influences extérieures des personnes d’origine rurale installées en milieu urbain, notamment à Bamako
Les mécanismes traditionnels de gestion des conflits sont efficaces et crédibles parce que les autres modes de résolution des conflits se réfèrent à eux et confirment leurs décisions. Cependant, leur efficacité ne résiste pas au temps et aux ambitions individuelles.
La parole donnée ne semble plus avoir un caractère sacré au hameau de Mpebougou et l’absence de preuves écrites ne permet pas de pallier cette dégradation morale. Curieusement, l’administration elle non plus n’a pas introduit des documents contractuels (convention, accord, traité, entente, etc.) afin de garantir le respect des engagements pris par les deux (2) parties.