Par WILANE, Cheikh (Nioro du Rip, septembre 2008)
C‘est une expérience personnelle car, à certains moments, j’ai joué le rôle de courroie de transmission entre les différents protagonistes
La localité de Nioro du Rip est située à quelque 250 km au sud est de Dakar, capitale du Sénégal. La vallée du Rip située sur la façade Ouest de Nioro est par excellence un lieu de convergence de différents acteurs ruraux ayant des visées et des intérêts particuliers souvent peu conciliants.
Cette vallée attire les agriculteurs pour la qualité de ses terres (cultures hivernales et de contre - saisons). C’est aussi le domaine de prédilection des éleveurs pour la qualité exceptionnelle de son pâturage parsemé de points d’eaux.
Les carrières de sable et de béton qui bordent la vallée attirent les camionneurs en quête de sable et de béton pour approvisionner les nombreux chantiers en construction. Les transporteurs et autres usagers de la route, notamment les charretiers, etc. voient d’un mauvais œil l’accumulation des dépôts de sable et de carrière près de la route et constatent amèrement la dégradation prononcée de l’écosystème (trous béants) et les dommages collatéraux crées sur l’axe reliant Nioro à la localité de Porokhane située à 6 Km environ à l’ouest de Nioro.
Dès lors, cette situation ne manque pas de poser de sérieux problèmes. Malgré la délimitation du parcours de bétail arrêtée de manière consensuelle par le chef d’arrondissement de l’époque (vers les années 70) de Porokhane et des autorités municipales de la commune de Nioro du Rip, les agriculteurs frappés par des années de sécheresse et de disette se sont tournés vers la vallée pour mener des activités de maraîchage de contre - saison.
Force est de constater que, chemin faisant, le fait d’affecter la vallée aux éleveurs ne permet plus de dissuader les agriculteurs en quête perpétuelle de terres fertiles. Et comme si cela ne suffisait pas, les entrepreneurs se mêlent à la danse et envoient des camions prélever du sable et du béton aux abords de la vallée et laissent les dépôts du matériau recueilli à proximité de la route. Et pis, ils s’enfoncent de plus en plus à l’intérieur des terres agricoles créant ainsi de sérieux désagréments aux agriculteurs et aux éleveurs dont les bêtes ont du mal à arpenter ces trous béants.
Les chauffeurs et autres charretiers inquiets de l’avancée des ravins s’organisent pour faire face à ce défi.
Donc, la vallée fertile source d’intérêt devient aussi source de conflits !
Pour résoudre ces différents problèmes, une médiation est récemment intervenue entre les différents protagonistes par l’autorité municipale très vite dépassée parce que contestée par certains agriculteurs, pour non compétence de la Mairie. La vallée étant hors du territoire communal. C’est ainsi que les autorités locales des communautés rurales de Paoskoto et de Porokhane s’en mêlent, chacun arguant le fait que la vallée se trouve dans sa zone. Au terme de plusieurs rencontres peu fructueuses, le Marabout de Porokhane et le Chef coutumier et délégué du quartier proche de ladite vallée Mamour Natou Ba ont convenu d’une solution à ce douloureux problème :
Une commission regroupant les communautés rurales de Porokhane et de Paoskoto devront délimiter un nouveau parcours de bétail aux environs immédiats de la vallée ;
Les agriculteurs occuperont l’intérieur des terres de la vallée ;
Les camionneurs sont déplacés dans un autre endroit peu fréquenté et loin de la route ;
Ces derniers seront tenus de verser 500 F CFA par chargement au délégué de quartier précité qui, à son tour, le reversera au « propriétaire de terre » désaffecté.
Les décisions arrêtées au lendemain des indépendances devront être réactualisées (délimitation de parcours de bétail).
Les limites géographiques du domaine communal et des domaines des communautés rurales restent insuffisamment comprises par les populations de ces différentes Collectivités locales.
La commune, semble-t-il a empiété sur l’espace dévolu aux communautés rurales (absence de concertation, manque de vision). D’où nécessité de procéder à un nouveau découpage ou à une révision de l’ancien découpage en tenant compte des facteurs économiques, sociaux, culturels et non politiques.
Sans occulter le volet de renforcement des capacités des acteurs sociaux à tous les échelons pour qu’ils s’approprient pleinement les contours des lois relatives à la décentralisation et la loi sur le domaine national.