Par DIOP, Macoumba (Nioro du Rip, septembre 2008)
Dans les années 1980, une partie de la population de la communauté rurale de Keur Moussa (région de Thiès) décide d’octroyer un champ d’une centaine d’hectare à un marabout. Avec l’extension progressive de cette exploitation agricole les détenteurs des champs situés à proximité et appartenant à une autre confrérie décident eux aussi de léguer leurs lopins de terre à leur marabout. L’explication donnée en son temps était que ces terres seraient exploitées et à eux la bénédiction du marabout et qu’il y aurait des retombées dans la confrérie.
C’est ainsi que des hectares de terres furent défrichées, laissant place à un semi - désert. Pourtant, ces terres autrefois très fertiles servaient à la culture céréalière (sorgho, maïs) et maraîchère en pluviale. Ces terres étaient traversées par un marigot qui prenait sa source vers le plateau de Thiès et se déversait dans le lac Tamna en hivernage. Pendant la saison sèche, l’eau stagnait par endroits dans ce marigot tels des bassins de rétention et permettait d’avoir du poisson (carpes et silures), les activités maraîchères aux alentours, et des abreuvoirs pour le bétail.
Pourtant, malgré les avertissements de quelques personnes (surtout des jeunes) les populations s’obstinaient à laisser ces terres au marabout.
C‘est ainsi que ces terres défrichées et dénudées furent exposées à toute forme d’érosion ; ce qui a abouti à l’ensevelissement du marigot et à la disparition de toutes activités annexes.
Pour exploiter les lopins de terres à proximité du champ affecté au marabout, il a fallu creuser des puits qui peuvent aller jusqu’à 15 m de profondeur. Malheureusement, ces puits sont ensevelis chaque année du fait des inondations et des sables transportés par les eaux de ruissellement. Les parcelles qui, jadis étaient exploitées parce que exondées, sont partiellement ou totalement inondées maintenant en hivernage. Cette situation a poussé les populations à retourner emprunter des parcelles au même marabout sur leurs terres qu’ils lui ont eux-mêmes affectées. Le lit du marigot enseveli, a fait que la nappe est devenue plus profonde et les populations ont souffert énormément pour gagner leur pain. Pire, le marabout pour qu’il concède à prêter aux propriétaires authentiques quelques parcelles sont assujettis aux conditions suivantes : pas de plantation d’arbres, un puits cimenté avec obligation de renouveler sa demande de chaque année. La stratégie du marabout consiste à conserver pour de bon ces terres.
S’il est vrai que la terre constitue une richesse, elle n’en demeure pas moins aussi une source de conflits. Ces terres affectées à ce marabout sont exploitées sans tenir compte du souci de préserver l’environnement et des conséquences néfastes du déboisement sur le vécu des populations.
La dégradation de l’écosystème s’est même répercutée sur les activités agro -sylvo pastorales de toute la zone.
Les générations actuelles et futures sont obligées de s’exiler vers d’autres localités pour accéder à des terres cultivables.
Cette dégradation des terres exploitées par le marabout a pour conséquence la disparition de la faune ainsi que de la flore qui faisaient le bonheur de vivre dans cette zone.