Par KPAKPO Afiwa (lomé, novembre 2009)
Dans les sociétés traditionnelles du Togo (un pays de l’Afrique de l’Ouest entre le Bénin, le Ghana et le Burkina Faso), la femme est une cause récurrente de conflits. La femme peut être l’objet d’un conflit entre individus, entre deux familles ou entre deux villages ou communautés. Un conflit autour de la femme entre deux communautés débouche très souvent en conflit armé.
Mais la femme dans ces sociétés n’est pas seulement source de conflits. Elle joue aussi un rôle pacificateur et même de cessez-le-feu entre deux communautés en guerre. A cet égard, les femmes d’une certaines catégorie (âgée et ayant de fonction rituelles ou initiatiques) interviennent très efficacement pour faire arrêter la guerre ou imposer le cessez-le feu immédiat.
Comment se prend la vieille femme pour provoquer un cessez-le-feu immédiat? La vieille femme se met nue et trace une ligne de démarcation entre les camps ennemis.
En pays Lamba, au nord du pays (préfecture de Doufelgou), on retrouve une vielle femme qui, pour obtenir un cessez-le-feu immédiat, se déshabille et asperge la foule d’une cendre éteinte ou bien jette la cendre en direction des ennemis ; puis elle se met à balayer symboliquement l’espace de démarcation séparant les deux camps. Elle peut, sans se déshabiller, tracer avec de la cendre une ligne de démarcation entre ennemis. Quand ceci se passe, en pays Lamba, la guerre cesse immédiatement.
Chez les Moba, les Naoudeba et les Lamba, la femme joue un rôle d’apaisement et intervient comme symbole de cessez-le-feu. En cas de conflit armé, elle va au devant de la scène avec une calebasse remplie de cendre qu’elle éparpille sur le sol. La cendre a pour signification le feu éteint, étant entendu que la guerre ou le conflit est assimilé au feu.
Chez les Kabyès, en cas de conflit de guerre interminable, la femme cout toute nue pour traverser les deux camps ennemis. Ceci provoque un cessez-le-feu immédiat, car la nudité de femme est considérée comme une malédiction pour la personne qui la voit. Symboliquement on expose aux belligérants leur origine ‘’ d’où ils sont sortis pour entrer dans le monde’’. Il faut dire que la nudité de la femme neutralise les pouvoirs magiques (gris gris et autres) qu’itilisent les guerriers pour se protéger.
Chez les Komkomba, un peuple du centre-ouest du Togo, la femme apporte à boire aux guerriers. Mais elle peut aussi signer l’armistice. Nue ou habillée, ses bras en l’air signifient un cessez-le-feu.
Chez les Agnanga au sud du Togo (Blitta) en cas de conflit grave, quand une femme sort de la maison pour crier ou si elle trace une ligne de démarcation avec de la cendre, aucun homme ne peut la traverser.
Comme on le voit, la femme ne joue ce rôle plus ou moins important qu’en période de guerre ou de conflits armés, ceux-ci étant rares de nos jours, le rôle de la femme dans la résolution des conflits est à peine perceptible. Son rôle est prépondérant dans la régularisation de la violence où elle apparaît comme symbole de la paix.Ce rôle pourrait être étudié en vue de sa revalorisation de nos jours. Mais on pourrait se demander quels égards la société d’aujourd’hui a pour une vielle femme, surtout les jeunes générations. Il est aussi important de questionner notre éducation qui est en perdition à force d’importation de valeurs extérieures surtout des civilisations essentiellement patriarcales où les vieilles personnes sont une charge dont il faut se débarrasser dans les maisons de pension.