Par TRAORE, Hamèye Timbaleck
En mars 1991, le régime militaire installé depuis 23 ans est renversé par un coup d’Etat qui donne naissance à un Gouvernement de transition et favorise l’organisation d’une Conférence nationale
La Mali amorçait alors une nouvelle ère de démocratie.
Les langues se délièrent et la Société Civile de plus en plus s’affirma par une multitude d’associations, d’ONG, de journaux et radios libres, de cabinets d’expertise privés. Cette mutation politico administrative provoqua un bouleversement social.
En 1992, le Gouvernement de transition organisa les premières élections pluralistes dont les résultats furent acceptés par l’ensemble des acteurs du processus électoral. A son tour, en 1997, la Troisième République organisa des élections générales qui, contrairement aux premières, furent controversées. Le premier tour des législatives du 13 Avril 1997 fut annulé par la Cour Constitutionnelle et une partie de la classe politique se mit en marge de l’ensemble du processus en cours. Le pays fut confronté à des dures épreuves mettant dangereusement en péril la paix et la sécurité.
Des élections transparentes, acceptées de tous, sont dans tous les pays du monde une condition sine qua non de l’instauration d’une démocratie apaisée, durable au sein de laquelle tous les acteurs inscriront leurs actions. La formation, l’éducation, la sensibilisation des citoyens, des leaders des partis politiques, des femmes, des jeunes constituent un cadre idéal d’échanges, de tolérance, de transparence et aussi un gage d’engagement et de participation responsable.
L’ONG-Association RECONVERSION –DEVELOOPEMENT (ARECDEV)), consciente des enjeux initiaux, lança, avec le concours de ses partenaires au développement, un projet de formation sur le processus électoral dans la Commune urbaine de Tombouctou dite la mystérieuse. A Tombouctou l’atmosphère entre le parti au pouvoir et l’opposition est des plus polluées. Dans les quartiers, la population est sur le pied de guerre ; une étincelle suffirait à embraser la ville.
C’est dans ce contexte qu’un matin du mois de Mai 1997-natif de la ville-je débarquai à l’aéroport pour coordonner au nom de la Société Civile (ONG-AREC-DEV) une formation au processus électoral avec l’ambition de contribuer à l’apaisement des ardeurs entre les acteurs de la vie politique qui, chacun de son côté, s’enfermait délibérément dans une tour d’ivoire refusant de dialoguer avec l’autre.
Ma présence dans la cité à ces moments d’expectative pour parler d’un sujet aussi tabou suscita d’un côté le doute, de l’autre l’espoir et je fus l’objet de questionnements à réponses variables.
Que faire ? Des deux côtés, les spéculations allaient bon train. La plupart de mes parents, certains de mes meilleurs amis. Etant du parti majoritaire, certains se réjouirent de ma présence sans, ni en comprendre quelque chose, ni être sûrs de mon engagement à défendre leur cause. Les autres, ceux de l’opposition en particulier, adoptèrent une attitude plus discrète, épiant mes allées et venues, mes contacts.
Quant à mon équipe et moi, plus sereins, nous naviguions entre les deux eaux à la tiède température. En tant que Société Civile, n’ayant pas de programme de conquête du pouvoir, nous devions adopter un comportement transparent, loyal, égalitaire et indépendant vis à vis des partis. Pour éviter toute erreur fatale, nous sollicitions les services d’une personne ressource, connue de tous pour son indépendance et sa loyauté vis à vis de la communauté. Ce patriarche vénéré de toutes les tendances servit de médiateur, de modérateur pendant toute la durée du projet (4 mois).
Petit à petit, les suspicions, les inquiétudes, les ardeurs se dissipèrent. Les populations dans les quartiers s’ouvrèrent aux séances formation, de sensibilisation ; le dialogue s’instaura au sein de la communauté et les responsables des partis politiques, toutes tendances confondues, mais aussi les militants, acceptèrent de participer dans l’entente, le respect mutuel aux différentes échéances électorales.