Par Youssouf KONE (Kadiolo, décembre 2008)
Kadiolo est un cercle situé au sud de Sikasso, 3ème région du Mali. Il se trouve à 100 km de Sikasso. C’est un village qui fait frontière avec la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso.
Sa situation géographique fait de lui un village carrefour par excellence. L’économie locale est très développée. Les femmes sont dynamiques dans la transformation des produits agricoles locaux (néré, karité, etc.). A ce titre, elles reçoivent l’appui technique et financier de plusieurs partenaires.
Le patrimoine foncier du quartier Noumousso est reparti entre deux grandes parties distinctes : le domaine foncier du Noumousso et celui de Kènèfasso, dirigée chacune par un « kulufolo ». Rappelons que le « kulufolo » est un terme Sénoufo signifiant maître de terre.
En 2006, j’avais concédé un lopin de terre à un paysan autochtone de Kadiolo pour une exploitation temporaire. Avec l’exploitation continue dudit champ, l’occupant a élargit son espace de culture en annexant un champ entier du « kulufolo » de kènèfasso.
Quand ce dernier s’est rendu compte de cela, il a rappelé à l’occupent que la parcelle annexée fait partie de sa propriété terrienne. Par conséquent, il lui a demandé d’abandonner les lieux. Il a nié tout fondement des propos avancés par le « kulufolo » et lui a signalé que la parcelle occupée appartient à Vamara, le « kulufolo » du Noumousso.
Pour résoudre ce litige, le « kulufolo » de Kènèfasso, propriétaire de la parcelle annexée est allé voir son homologue de Kènèfasso afin de trouver une solution à l’amiable.
Ils se sont rendus sur les lieux, en compagnie des conseillers du chef pour constater les faits et de trouver une solution à la crise.
Connaissant les anciennes limites deux domaines fonciers, les autorités coutumières ont vite repéré que la parcelle, objet de litige appartenait sans nul doute au « kulufolo » de kènèfasso.
Après le constat fait sur le terrain, le « kulufolo » lui a immédiatement ramené à l’ordre en lui ordonnant de restituer la parcelle annexée à son champ car, elle ne faisait pas partie du domaine foncier du « kulufolo » donataire.
Ce dernier l’accepta sans problème et le litige a été définitivement
Le champ du droit coutumier est occupé par les chefs coutumiers qui constituent les seuls référents. Traditionnellement, ces chefs sont sollicités en matière d’accès aux terres de culture. Le village apparaît un niveau où le foncier offre encore une grande disponibilité dont les enjeux restent minimes. C’est pourquoi, dans cette localité, le droit coutumier règne en maîtresse. Par ailleurs, chez les Sénoufo de Kadiolo, les coutumes veulent qu’en matière foncière, il faut solliciter nécessairement le « Kulufolo » pour avoir lopin de terre à cultiver. Cela se fait par simple requête verbale appuyée souvent par des noix de cola ou une somme allant de 100F à 500F. Paradoxalement, l’Etat ne condamne nullement cette disposition qu’il juge illégale car, la seule référence ne matière foncière reste le droit « positif ». Cela laisse à interpréter que le droit coutumier est toléré par l’administration. Il ressort également qu’au lieu que les protagonistes partent se plaindre au niveau des autorités judiciaires, ils sont plutôt aller voir le « Kulufolo » pour résoudre leur problème.
Cette fiche est issue de l’entretien réalisé avec Monsieur Vamara Koné, Kulufolo (maître de terre) et chef de quartier à Kadiolo Noumousso. La supervision a été assurée par Monsieur Djibonding DEMBELE (Correspondant thématique) et par Madame Néné KONATE (Médiatrice de l’ARGA/ Mali).