Par Ambroise DAKOUO (Gao, février 2009)
La ville de Gao, capitale de la septième région administrative du Mali, est située au Nord du pays. Dans la ville de Gao, on rencontre différents groupes ethniques dont les sonrhaïs, les armas, les peuhls, les bellas, les bambaras, etc. Les principales activités de la zone sont l’agriculture, l’élevage et le commerce. La religion dominante dans cette localité demeure l’islam. On y retrouve également des chrétiens et des animistes.
Dans cette ville, les autorités traditionnelles jouent un rôle important dans la gestion des conflits sociaux. En effet elles constituent des personnes ressources dotées de sagesse et de clairvoyance.
De nos jours, face aux conflits qui apparaissent dans la société, elles s’investissent pour la recherche de solutions consensuelles et collaborent dans avec les autorités judiciaires de la ville. En 2001, un chef de famille de Gao est décédé en laissant derrière lui des terres. Les filles du défunt et ses frères ne se sont pas entendus sur le partage de cet héritage. Ils ont porté le problème devant le coordinateur des chefs de quartier de la ville. Les filles du défunt ont réclamé après la mort de leur père l’intégralité des terres qui appartenaient à ce dernier. A leur tour les frères du défunt ont réclamé leur part d’héritage. Des tensions sont nées entre la famille du défunt et celles de ses frères.
Pour résoudre le conflit, le coordinateur des chefs de quartier de la ville de Gao a réuni ses conseillers et les imams. Ces derniers se sont concertés en vue de déterminer les droits des différentes parties. En réalité, la difficulté du litige résidait dans le fait que dans la tradition songhaï, à laquelle les protagonistes appartiennent, les femmes n’héritent pas de la terre. C’est cet argument que faisaient valoir les frères du défunt. La prise en compte de ce principe était d’autant plus difficile à appliquer que le défunt n’avait aucun fils. Cela rendait difficile la dépossession totale de ses trois filles.
Le coordinateur des chefs de quartier de la ville de Gao, ses conseillers et les imams, sont parvenus à trouver une solution qui prend en compte les intérêts de toutes les parties. Le partage a été réalisé en octroyant les deux tiers des terres aux filles du défunt. Le reste a été distribué entre les frères du défunt. La décision des autorités traditionnelles part du fait que le défunt n’avait laissé derrière lui aucun autre bien matériel. Ceci rendait impossible la dépossession de ses trois filles dans le partage des terres. Le souci principal qui animait les conciliateurs étaient d’arrivé à une solution consensuelle. Les différentes parties, ont été invitées dans la cour du coordinateur des chefs de quartier de la ville de Gao. Ce dernier les a informées de la décision prise par lui ses conseillers et les imams.
Vu la nécessité de préserver les liens familiaux et surtout la légitimité des acteurs qui ont rendu le jugement, les différentes parties se sont donc engagées à accepter la décision et à la respecter.
Après cela, le coordinateur des chefs de quartier de la ville a adressé une correspondance aux autorités judiciaires, les informant du problème et de sa solution. L’accord intervenu entre les parties a été homologué par les autorités judiciaires. Cette formalité a rendu légale la solution arrêtée par les autorités traditionnelles.
Ainsi ce litige a été définitivement réglé et n’a plus ressurgi. Grâce à la médiation continue des imams les différentes parties ont renoué les liens familiaux qui avaient été mis à rude épreuve, par le conflit.
Les mécanismes traditionnels en milieu local constituent des alternatives à la justice moderne en se qu’ils permettent de résoudre efficacement les conflits locaux. Pourtant en l’absence d’un contexte juridique légal, les décisions de ces instances traditionnelles de décisions paraissent vulnérable. L’importance de mécanismes traditionnelles de justice ne doit être ignorer vu son importance pour les populations locales. En effet, la reconnaissance des décisions issues de ces instances par les autorités judiciaires quand les décisions sont acceptées par les différentes parties en conflits constitue un facteur de reconnaissance et de cohabitation judiciaire.
Cette fiche est issue de l’entretien avec Monsieur Namory CAMARA, Président du Tribunal de première Instance de Gao.