Par Ambroise DAKOUO (Kidal, février 2009)
La ville de Kidal, chef lieu de la huitième région administrative du Mali se situe au Nord du Mali. La ville de Kidal comprend une population estimée à 25 000 habitants, pour une superficie de 10 000km2, soit une densité de 3 habitants au km2. Cette population est constituée essentiellement de kel tamacheq, cependant on dénombre également la présence de différents groupes ethniques dont les maures, les sonrhais, les bambaras, etc. La population majoritaire qui sont les kel tamacheq est répartie en quarante (40) fractions qui sont des groupes identitaires au sein du même groupe ethnique. La principale activité de la zone demeure l’élevage de type transhumant de camelins, de caprins et d’ovins ; toutefois on note que le commerce et l’artisanat se développent de façon satisfaisante. La principale religion dans cette localité est l’islam.
Les populations de Kidal, ont un mode vie bâti sur le tribalisme, elles sont administrativement organisées au sein des groupes appelés fractions. La fraction étant une société tribale.
Dans le processus de la construction de l’Etat-nation après l’accession à l’indépendance en 1960, la République du Mali a été confrontées à plusieurs rébellions. La ville de Kidal à l’instar d’autres localités du Nord a été le lieu de ces rébellions armées. Si les causes de ces rébellions sont évolutives, il commande de se référer pour leurs analyses à la politique de l’administration coloniale et aux paradigmes politiques post- colonial sous le régime du parti -unique. La dernière rébellion en date celle de 2007- 2008, dont les causes sont la revendication de plus de politiques audacieuses en vue du développement du Grand Nord, a abouti lors de l’éclatement à la prise d’otages militaires dont nombre a été estimé à une trentaine de personnes.
Pour parvenir à la libération de ces otages, les autorités politiques du pays ont impliqué les autorités traditionnels locales dans la médiation. Les autorités traditionnels impliqués sont le chef traditionnel (qui est par ailleurs est le chef de toutes les fractions touaregs, arabes, maures), le cadi de la ville et certaines personnalités reconnues pour leur sagesse. Dans leur mission de médiation, les autorités traditionnels sachant que les rébels sont tous des touaregs, donc comme eux appartenant à la même coutume et partageant la même tradition religieuse, ceux- ci ont donc axé leurs interventions sur le respect des valeurs fondamentale de la culture kel tamacheq. En effet, la tradition culturelle des kel tamacheq interdit l’incarcération et surtout la violation des droits de liberté de la personne humaine. Or la pratique des rébels contredisait cette norme coutumière. Pour les emmener au respect de cette norme, les acteurs traditionnels, à travers des dialogues francs et constructifs, ont fait valoir l’importance du respect des valeurs culturelles propres à leur société, la nécessité de garantir la paix et la stabilité sociale.
Suite à la médiation des acteurs traditionnels, les rébels ont également fait valoir leurs exigences ; mais il faut avouer que la médiation a rendu possible une libération rapide des otages. En effet, le principe de la libération des otages n’a point été réversible et s’est déroulée suivant plusieurs vagues successives ; permettant la libération effective des otages dont la dernière vague a été libérée courant janvier 2009.
La médiation des acteurs traditionnels s’est déroulée avec succès, car aucun blocage culturel et linguistique ne les séparaient des rébels. Cette conditionnalité en soi installe un climat de confiance qui fait que les acteurs traditionnels peuvent intervenir sur la base des règlements coutumières auxquels l’ensemble des acteurs s’identifient.
La gestion des crises comme la rébellion peut se baser sur l’intervention des chefs traditionnels et religieuses, car ceux- ci peuvent emmener les belligérants à l’acceptation des valeurs et des principes de base qui fondent l’esprit du vivre en commun. Dans la gestion de cette, il y a eu l’intervention en commun de plusieurs acteurs traditionnels, religieux et socio- professionnels. L’intervention de ces derniers rend la gestion de la crise extra juridique de telle sorte que les valeurs socio- culturelles deviennent des paramètres de choix dans la recherche du consensus et de la paix.
Cette fiche est issue de l ‘entretien avec Monsieur Wadossene Ag SIMITALLA, Ancien député élu à Kidal.