Cohabitation entre chefferies traditionnelles et autorités communales.

Quand les rivalités entre chefs traditionnels renforcent le pouvoir du maire.

La commune d’Aného a cette particularité d’être dirigée sur le plan coutumier par deux chefs traditionnels. Cette situation tire ses origines des rivalités historiques entre deux collectivités.

Les premiers occupants sont d’origine Adja Tado, les Pla et les Péda. Ceux-ci se sont installés vers le 16e siècle et forment la collectivité Adjigo. Les Guins et les Mina arriveront au 17e siècle. Ce sont les Lawson.

Dès le départ, la cohabitation fut très conflictuelle. Une guerre éclata entre les deux communautés entraînant l’exode des premiers occupants. Les vainqueurs ont eu le temps de s’organiser. Mais après quelques années, les vaincus ont décidé de revenir s’installer à nouveau sur leurs terres. Depuis lors, à la commune d’Aného flottent deux drapeaux.

Le chef des Lawson a sollicité et obtenu du Président de la délégation spéciale une autorisation lui permettant d’ériger la statue de Jésus Christ dans la ville. L’ouvrage a été réalisé.

Le chef des Adjigo s’oppose à cette réalisation soutenant qu’il n’a pas été consulté. Le président de la délégation spéciale soutient que c’est par courtoisie qu’il consulte sur certains sujets les chefs traditionnels. Il rappelle que c’est lui l’autorité suprême dans la commune, donc le supérieur hiérarchique des chefs traditionnels. De ce point de vue, il n’a pas besoin d’avis pour poser des actes relevant de ses prérogatives.

Après de nombreuses initiatives de réconciliation entre les deux chefs traditionnels sans succès, le maire décide de saisir l’occasion du conflit autour de la statue de Jésus Christ pour s’impliquer personnellement afin de résorber pour de bon le conflit qui oppose ces communautés depuis des siècles. A son initiative, une commission a été créée pour tenter une résolution durable du conflit. A la fin des assises, une photo de réconciliation a été prise pour immortaliser l’événement. Mais la paix obtenue était fragile. Il a suffi qu’un des chefs utilise cette photo en d’autres circonstances pour que les protestations de l’autre fassent réapparaitre le conflit.

Aujourd’hui, tout sujet ou initiative qui nécessite le consensus entre les deux chefs traditionnels a plus de chance de ne pas aboutir, vu les positions tranchées qui caractérisent leurs rapports.

Dans cette situation, pour toute action de développement dans la commune, c’est le président de la délégation spéciale qui prend ses responsabilités en s’imposant aux deux chefs qui se soumettent à sa décision. Il a bien sûr l’appui du Préfet et du Ministre de l’administration territoriale.

Commentaires

Les rivalités entre chefs traditionnels n’ont d’autre effet que de nuire au développement local. Face aux légitimités historiques en conflits, la légalité formelle s’impose. Quand les institutions coutumières sont en conflit, ce sont les institutions dites modernes sinon le droit dit moderne qui se trouve renforcé.

En outre, nous sommes en face d’une situation inédite où le maire est un acteur de résolution des conflits entre chefs traditionnels.

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